L’Avent, un vrai chantier !

Une voix venue de la Bible  nous invite à faire de la place pour accueillir Celui qui donne sens à notre vie : Réconfortez mon peuple, c’est urgent, dit votre Dieu. J’entends une voix crier : « Dans le désert, ouvrez le chemin au Seigneur ; frayez une route  pour notre Dieu dans la plaine aride ! Que le niveau des vallées soit relevé, Que les montagnes et les collines soient abaissées ! Que les reliefs soient changés en terrain plat et que les chemins raboteux soient aplanis !

Ouvrez , frayez, rabaissez, rendez droit,  aplanissez…
Oh la la , c’est dans la Bible, tout ça ? On se croirait plutôt dans un chantier de travaux publics..un peu comme dans ces carrefours et rues à Nîmes ! Et pourtant si, c’est bel et bien dans la Bible. C’est le prophète Esaïe qui parle, bien avant la naissance de Jésus, cinq siècles plus tôt. Esaïe est envoyé par Dieu pour avertir son peuple que des changements vont se produire : en effet, après 40 ans de vie en exil, à Babylone, loin de son pays natal, le peuple d’Israël voit s’ouvrir enfin un horizon : le retour vers la terre natale. L’épreuve de la déportation est bientôt terminée. Le peuple va pouvoir rentrer, reconstruire le pays et le Temple qui avaient été détruits par l’armée babylonienne.

Esaïe reçoit pour mission de réconforter son peuple et de l’accompagner. Mais attention : ce n’est pas pour le conforter ni pour le plaindre. Non, car le peuple d’Israël a dû se remettre en question pendant toutes ces années, retrouver une relation juste avec Dieu, après avoir vécu trop longtemps sans tenir compte de sa Parole.

Préparez -vous ! dit Esaïe à son peuple. Plus précisément : Dégagez un chemin pour le Seigneur ; frayez une route pour notre Dieu. Que ce qui est haut soit abaissé et ce qui est en bas soit relevé !

Qu’est -ce qu’il veut nous dire par là, le prophète ? Est-ce que cela signifie que Dieu se fait désirer et qu’il faut lui dérouler le tapis rouge ? Le Seigneur a t-il vraiment besoin qu’on fasse tout ça pour lui ? En fait, quand Esaïe parle de chemin, de vallées, de collines et de sentiers, il ne fait pas un cours de géographie sur la route qui relie Babylone à Jérusalem, mais il nous emmène …ailleurs : car Esaïe est aussi poète : ce qu’il évoque ici se rapporte à nos vies. Les mots qu’il prononce renvoient à des paysages intérieurs, qui sont comme une parabole de nos existences , solides ou fissurées, calmes ou mouvementés, sereines ou chaotiques.

« Je ressemble à un désert , dit un jour un vieil homme assis sur le banc dans un parc : je me sens tout sec, j’ai tellement pleuré dans le passé que je n’ai plus de larmes. »

« Je suis comme une flaque d’eau » raconte la voisine d’une amie. Je me retrouve au ras du sol, ma vie a été piétinée, on a marché sur ma dignité. J’aimerais pouvoir me redresser, me tenir debout, comme une montagne que personne ne peut détruire ».

Préparez le chemin pour le Seigneur ‘….proclame Esaïe. Il ne s’agit pas de savoir si Dieu nous fera prendre la nationale ou les petites routes : il s’agit de voir s’il peut se frayer un passage jusqu’à nous, autrement dit : s’il y a (encore) de la place pour Lui chez nous, en nous, ou bien si tout est encombré, bouché, occupé. Que ce soit pour de bonnes ou de mauvaises raisons..

Et bien c’est parfois à l’image de nos vies, de situations qu’on a choisi ou qu’on subit malgré soi.
En tous cas, la question est posée à chacun  : Est -ce que la voie est libre ? Ou y a t-il des cailloux qui nous font mal quand on marche, des obstacles qui nous empêchent d’avancer ? Nos cœurs sont-ils prêts, disponibles pour accueillir cette présence que le Christ nous offre ? Pour entendre sa Parole et le suivre ?
Allons -nous, dans quelques semaines, sauter à pieds joints dans les Fêtes de Noël, les cadeaux à acheter, les lumières à faire clignoter, les dîners à préparer, les budgets à calculer ? Ou serait-ce l’occasion de nous rappeler pourquoi nous célébrons Noël, et faire de la place dans nos cœurs à celui qui n’a pas eu de place à l’auberge de Bethléem le jour de sa naissance ?

Comment préparons nous la venue de ce Dieu qui a décidé il y a 2000 ans de se révéler « en s’ajustant au plus petit diamètre » en se faisant tout petit et fragile, pour manifester son amour pour chacun de nous ?

En fait, le prophète Esaïe, sous des allures de chantiers et de travaux publics, nous invite à une activité spéciale : faire le ménage à l’intérieur de nous-mêmes. C’est une bonne chose, car nous sommes souvent encombrés de choses inutiles, ou bien qui occupent tellement  de place dans notre quotidien qu’il ne reste plus beaucoup d’espace ni de temps pour  accueillir  la question du sens de la vie, de la présence de Dieu ou de son absence.

Alors, prenons pelles et pioches et creusons des espaces vides, des ouvertures , pour faire place à la rencontre, au désir de Dieu. Un écrivain, dans un petit livre intitulé ‘Ressusciter’, écrivit cette phrase qui m’a toujours touchée : «j’ai enlevé beaucoup de choses inutiles de ma vie et Dieu s’est approché pour voir ce qui se passait. »  2   

Amen

Titia Es-Sbanti
Prédication du culte caté du 4/12/2021, « La clé à molette » –  temple du Mas des abeilles

(1) voir  la méditation : https://nimes-eglise-protestante-unie.fr/dieu-cle-a-molette/

(2) Christian Bobin.