À la rencontre de nos temples
Sous la plume de Jean Fleury, évoquons successivement les différents temples qui furent utilisés ou élevés à Nîmes depuis l’implantation de la Réforme dans notre cité.
Petit Temple Grand Temple Oratoire
Une Église qui naît… sans temple ni pasteur !
Les idées nouvelles arrivent à Nîmes
Nîmes est touchée par l’humanisme et la Devotio moderna dès le XVème siècle. Le catholicisme médiéval traditionnel perd de son influence, d’autant que les évêques, non résidents, abandonnent leurs ouailles à un Vicaire général… Toutefois, les idées de la Réforme luthérienne pour un retour à une Église résolument évangélique n’y arrivent que vers 1530 et d’abord dans les milieux intellectuels.
- L’oligarchie municipale : une quinzaine de familles de riches négociants contestent le pouvoir temporel de l’évêque et se mêlent même de sa gestion religieuse dès le début du XVIe siècle !
- Le clergé : ainsi, le Prieur des Augustins tient le message du « pur évangile » de Lefèvre d’Étaples dans ses prédications de Carême de 1533. Désapprouvé par l’évêque, il est protégé par le Conseil de ville. Augustins, Dominicains et Franciscains se convertiront bientôt en masse.
- Le Collège royal que François Ier établit en 1539 à la demande de sa sœur Marguerite, reine de Navarre, est résolument évangélique avec, pour régent, le célèbre humaniste Baduel.
Après les intellectuels, le peuple… mais on reste dans la clandestinité
Bientôt le petit peuple des artisans et ouvriers du textile suivra selon des modalités plus radicales, volontiers iconoclastes. Une communauté réformée clandestine se constitue sur le modèle strasbourgeois de Bucer, avec des diacres et une forte implication des Anciens désignés par les fidèles. On se réunit chez des particuliers dans les quartiers populaires (actuel quartier Gambetta). Une lettre adressée à Calvin le 15 juillet 1547 en témoigne ; des fidèles y donnent des nouvelles de Nîmes et de l’Ecclesia Uticensis leur voisine. Calvin ne répond pas directement mais, vu les persécutions qui sévissent dans le royaume, précise dans sa circulaire aux Fidèles de France, qu’ils doivent se contenter de réunions de prières et de lectures bibliques.
« Nous ne sommes nullement d’avis que vous commenciez par ce bout, et même que vous soyez hâtés d’avoir la Sainte Cène, jusqu’à ce que vous n’ayez un ordre établi entre vous. Et, de fait, il vous faut beaucoup mieux de vous en abstenir, afin que vous soyez induits par cela à chercher les moyens qui vous en rendent capables ».
S’ils veulent vivre leur foi en Église, qu’ils rejoignent une Église déjà constituée, à Genève par exemple ! Les Nîmois ont sagement obéi. Certains sont partis à Genève d’où ils exhortaient les « frères » restés sur place, à attendre des circonstances plus favorables. L’élan étant donné, 8000 Nîmois – la moitié de la population – avaient choisi la Réforme en 1557.
Une Église sans temple… mais avec pasteurs !
A la mort d’Henri II, pensant la situation mûre, Calvin envoie enfin des pasteurs formés à Genève ; Nîmes en reçoit deux : le normand Guillaume Mauget en septembre 1559, puis en mars 1560, l’Ardéchois Pierre de La Serre. Ils prêcheront dans le quartier industriel de l’Agau (rue de la Ferrage), puis en plein air, dans le grand jardin de la veuve de Matthieu Dumas, dans le faubourg Nord, près du couvent déserté des Dominicains (dits aussi Frères Prêcheurs ou Jacobins : emplacement de l’actuelle église St Charles). Premières Cènes et premiers baptêmes pour Pâques 1560.
A l’issue du culte de Pentecôte, profitant d’un auditoire nombreux, on s’empare de la chapelle vide de St-Etienne de Capduel toute proche – derrière la Maison carrée – ! La réponse sanglante de Guillaume de Joyeuse ne se fait pas attendre ; les deux pasteurs s’enfuient vers Montpellier ! En décembre François II meurt, Antoine de Crussol remplace Joyeuse et les fugitifs rentrent à Nîmes.
Enfin « dressée »
Le samedi 23 mars 1561, I’Eglise réformée de Nîmes est enfin « dressée » avec ses diacres et son Consistoire, tandis que Bernard d’Elbène devient évêque ; résidant sur place, il tentera d’enrayer les progrès calvinistes en réformant son évêché selon les directives du Concile de Trente. Se sentant menacés, les protestants s’arment en avril 1561 et s’emparent de la ville. Le 14 mai, le pasteur Mauget préside à Nîmes le premier Synode du Bas-Languedoc, réunissant pasteurs et laïcs des 8 premières églises dressées : Nîmes, Alais, Sommières, Calvisson, St Gilles, Aigues-Mortes, Marsillargues et St Géniès. On y convient de la nécessité d’une école de théologie afin de former les pasteurs sur place, Genève n’y suffisant plus. En octobre, Calvin enverra dans ce but Pierre Viret lui-même, ce proche collaborateur qui avait évangélisé le canton de Vaud !
Lutte ouverte pour un lieu de culte
La chapelle St Étienne étant petite, on multiplie les cultes dans différents lieux et souvent en plein air ; les deux pasteurs s’y épuisent. Devenus majoritaires, les Réformés estiment qu’ils ont droit à l’accès des bâtiments construits par leurs pères, souvent vides désormais, et où ils se rendaient jadis chaque dimanche. L’évêque ne veut évidemment rien entendre.
Le 29 septembre 1561, quelques gentilshommes dont Nicolas Calvière, Seigneur de St Côme, et leurs partisans, s’emparent sans coup férir de la chapelle Chapelle de l’Observance désertée de ses moines (futur couvent des Récollets vers l’actuelle place d’Assas). On prend soin d’en transférer les reliques chez le deuxième consul resté catholique, puis l’on aménage la salle en temple. Arrivé de Genève le mardi 7 octobre, Viret y prêche dès le lendemain, puis le 14 Novembre, devant 8000 personnes.
Le premier « Grand temple »….la Cathédrale !
Le Lundi 15 décembre, des religionnaires s’emparent de la cathédrale pendant la messe ! Pour la récupérer, l’Evêque cède l’église Ste Eugénie et le couvent des Augustins (emplacement de l’actuelle Stes Perpétue et Félicité). Mais dès le dimanche suivant, à la sortie du culte présidé par Viret à Ste Eugénie, la cathédrale est de nouveau investie et l’on en brise les statues avant de mettre à sac les chapelles des couvents des Jacobins et des Carmes (près de la porte d’Auguste). L’évêque se réfugie chez le Président du Présidial, Guillaume de Calvière de St Césaire de Gauzignan, le frère resté catholique de Nicolas ; avec son aide, l’évêque s’enfuit en Arles le lendemain.
Pierre Viret célèbre donc le culte de Noël avec Sainte-Cène, dans la cathédrale, devant 8000 participants dont de nombreux chanoines, plusieurs religieuses de Tarascon ainsi que le prieur de Milhaud, qui abjurent les « erreurs papistes ». Le dimanche 4 janvier 1562, deux cultes successifs avec Cène s’y déroulent à nouveau ; ils rassemblent chacun 7000 personnes, le premier présidé par Mauget à 5 h du matin et le second à 8h, par Viret en présence des Corps constitués avec Consuls et Présidial en costumes ! Nîmes a officiellement choisi la réforme.
Cependant, le 17 janvier 1562, Catherine de Médicis fait signer l’Edit de St Germain au jeune Charles IX : les cultes seront autorisés dans le royaume dans certains lieux, mais les églises doivent être restituées. En accord avec Calvin, Viret prêche la modération et obtient un compromis avec le Chapitre : « Puisqu’il est arrêté pour le présent, qu’il faut rendre les temples et les armes, nous n’y pouvons contrevenir sans, premièrement, désobéir à Dieu et être tenus pour mutins, séditieux et rebelles, sans irriter grandement le roi et son Conseil, et inviter M. de Crussol, Lieutenant du roi, en ce fait, à user de force et de rigueur contre nous, au lieu qu’ils ont une bonne volonté de nous accommoder et nous tenir en leur sauvegarde et protection contre nos adversaires, car il n’est pas question du fait principal, mais de l’accessoire, vu qu’il ne nous est pas défendu de nous assembler et de faire tout ce qui appartient au vrai service divin, en nos assemblées, mais seulement d’occuper les temples, voire à telle condition que nous avons promesse que lieux commodes nous seront octroyés pour nous assembler, et ceci par autorité du roi, lequel point est bien à noter, car, jusqu’à présent, nos assemblées n’ont point été autorisées par l’autorité du roi, comme elle le seront à l’avenir… »
Guerre civile et alibi religieux…
Le 2 mars 1562, le massacre de Wassy ordonné par Guise avec le soutien de l’Espagne vient rompre la Paix de St Germain ! Pourtant, le 29 mars : 12000 fidèles assistent encore, obéissants, au culte de Pâques sur le talus des fossés, au pied du château royal où réside Crussol, et ce malgré une éclipse du soleil dans laquelle chaque parti veut voir un présage… opposé évidemment !
Cette obéissance relative sera de courte durée ; en mai, le Collège, Ste Eugénie et la cathédrale sont à nouveau pris par les réformés pour célébrer le culte de Pentecôte présidé par Mauget. Déjà le Conseil arme la ville et renforce les fortifications car la guerre fait rage dans le Royaume ! Durant l’été, évêque et prêtres sont chassés de Nîmes par le Consulat ! Les reliquaires des églises nîmoises sont vendus et les cloches fondues, pour effort de guerre. Opposé à Joyeuse, Crussol laisse faire et accepte même de devenir Protecteur de l’Eglise réformée du Languedoc, à l’exemple des Princes allemands… En octobre 1562, le Président du Présidial, rappelle –symboliquement- au Consistoire l’obéissance due au roi…
En mars 1563, l’Edit de pacification d’Amboise autorise à nouveau les protestants à construire des temples en certains lieux et à y pratiquer leur culte, mais la confusion est grande et l’Edit ne satisfait personne. Pour renforcer l’aura royale, Catherine de Médicis présente le petit roi à son royaume dans un « Grand Tour » de 4000 kms, traversant toutes les régions protestantes ! La Cour devient itinérante du 24 janvier 1564 au 1er mai 1566. Précisons qu’un août 1564, le roi fixe le commencement de l’année 1565 au 1er janvier et non plus aux ides de mars : janvier et février1564 n’existeront donc pas !
Le 24 décembre 1564, La Cour est reçue à Nîmes ; après sa visite, Charles IX autorise d’y construire un temple. La Lettre patente n’est délivrée par le Parlement de Toulouse que le 13 mars suivant : « Le roy a ordonné aux habitans de Nismes… de la religion dicte refformée, deux lieux ou places pour fere exercice de leurdicte religion… assavoir ung cazal et jardin appartenant à Roquerol près la maison de Mathieu Desi rue par là on va de la porte de la Magdalenne a la maison carrée et l’autre en la maison et jardin de Tristan Chabaud près la maison de Maître Bernard Barriere, Procureur du roy, rue appelé la calade : pour lesquelz lieux achepter, construire et édiffier, leur est permis lever deniers sur eulx de gré à gré, jusques a la concurrence de la somme requise et nécessaire ».
Le « Grand temple » de la Calade
Sous le nom de Pierre Rosel, Conseiller au Présidial, le Consistoire achète donc les terrains à l’emplacement du Théâtre actuel et de la « maison du Lys » ; Jean Deyron finance l’opération. Le 27 juin, le Président Calvière, désormais converti, et Denis de Brueys, S. de Saint Chaptes, président la cérémonie de fondation ! La construction est rapide : un bâtiment rectangulaire de 30 m sur 48 m, sur le même modèle – en 3 fois plus grand – que le temple subsistant au Collet-de-Dèze. Pour éviter tout pilier, la faîtière repose sur un grand arceau longitudinal (de plus de 45m de portée) partageant la nef en deux, et achevé le 17 octobre ! Puis à travers chaque mur, on aménage des extensions triangulaires surélevées qui donnent finalement une forme octaédrique à l’édifice ! Trois portes le desservent : la principale, monumentale avec probablement un escalier de quelques marches, qui donne à l’E sur la place de la calade, et deux autres, latérales, plus petites. L’aménagement intérieur dégage un vaste espace avec chaire centrale entourée de gradins le long des murs, en trois niveaux montant jusqu’aux fenêtres situées en hauteur. Ce local doit être assez sombre mais nous ne disposons malheureusement d’aucune iconographie pour donner une idée plus précise.
Le chantier n’est pas terminé quand, le 27 janvier 1566, on inaugure le bâtiment, avec trois prêches donnés successivement par trois nouveaux ministres récemment arrivés. La chaire ne sera accrochée au pied de l’arc médian qu’en mars ! Puis, pour accueillir davantage de fidèles –jusqu’à 5000 dit-on, – on ajoutera des galeries en bois, en appui sur l’arceau central et avec des accès extérieurs. C’est là que se tiennent les hommes, debout ; seules les femmes et les notables sont assis sur des bancs, en parterre.
Des maisons se construisent rapidement autour ne laissant visible que la façade du porche… Des cours intérieures desservent les portes latérales pour déboucher, par des couloirs, sur les rues de la Colonne (actuelle rue de l’Horloge) et de la Madeleine ; aménagée en 1605, celle-ci subsiste au n° 30 de cette rue. Au fronton était placé le texte biblique: « C’est ici la maison de Dieu, c’est ici la porte des cieux » qui fut martelé à la Révolution. Le bâtiment ancien attenant comprenait une grande salle surplombant le passage et donnant dans le temple, qui fut l' »auditoyre » de l’école de théologie puis la bibliothèque à partir de 1609, quand les activités universitaires se regrouperont autour du petit temple (Cf. plus loin). Après la fermeture de celui-ci en 1664, l’école de théologie protestante s’y repliera.
A peine terminé, voilà que les guerres religieuses reprennent en 1567… Fin septembre une bande d’Huguenots déclenche la sinistre Michelade. La guerre est générale quand, dans la nuit du 5 septembre 1569, le temple est incendié par une bande catholique qui a repris la ville ! Il sera sauvé de justesse par des voisins catholiques inquiets de la propagation de l’incendie. La ville, finalement reprise par les Huguenots en novembre, restera protestante jusqu’en 1629. Le 8ème Synode national s’y réunit le 2 mai 1572 et Théodore de Bèze prêchera durant deux heures dans le temple réparé.
En 1581, le temple de la Calade est pourvu d’un clocher avec une cloche de 19 quintaux ; jusqu’à présent les temples calvinistes en étaient généralement dépourvus. L’Edit de Nantes de 1598 provoque à Nîmes le retour d’un évêque et d’un clergé catholique avec la réouverture des églises ! Pourtant la communauté protestante reste florissante durant le règne d’Henri IV. La chronique rapporte que le temple étant trop petit, il faut souvent prévoir 3 ou 4 services successifs et obliger les fidèles à sortir à chaque fois ! Un « souvent » qui nous fait pâlir d’envie ; il est sûrement vérifié pour les grandes fêtes mais pas chaque dimanche ! Ce qui est certain par contre, c’est que le Consistoire réclame la construction d’un second temple –et de nouveaux postes pastoraux- et qu’il faut donc justifier cette demande ! Nous verrons ce qu’il en adviendra.
Quand un Temple devient Théâtre !
L’assassinat du roi Henri puis les guerres de Rohan affecteront peu les cultes du Grand temple de Nîmes, pas plus que l’arrivée de l’évêque réformateur Cohon, anti-protestant déclaré. Par contre l’avènement du Roi soleil inaugure les années funestes pour ceux de la « Religion Prétendue Réformée ». L’Edit de Nantes est « interprété » à leur détriment et de nombreux Edits pris à leur encontre ! En 1681, sur l’ordre de Louvois, le Poitou inaugure les premières dragonnades. En Languedoc, l’intendant Daguesseau préfère la persuasion mais déjà en 1683, le roi commence à faire détruire 33 temples dépourvus d’autorisations écrites de fondation. Le 9 mai, des incidents ont lieu à la sortie du culte de la Calade. Fin juin arrivent les troupes du nouveau Lieutenant Général, le duc de Noailles. Le 4 juillet, à la tête d’une importante délégation comportant le Vicaire général, les chanoines mais aussi les Consuls et les officiers du Présidial, l’Intendant se rend au Temple pour lire, comme dans tous les temples du royaume ce dimanche-là, un « avertissement fraternel » des évêques français exhortant solennellement à la conversion ; l’assemblée écoute en silence puis le pasteur Elie Cheyron lit une protestation…. Le Consistoire se réunit de nuit : si les pasteurs Peyrol et Icard préconisent la résistance, ils sont désavoués par les pasteurs Paulhan et Cheyron qui optent pour la soumission avec le président du consistoire, Monsieur de St Côme.
Noailles place 8000 dragons à Nîmes et les temples de Saint-Hippolyte et Montpellier sont rasés ! En septembre, en quelques jours, on enregistre 60 000 abjurations en Bas Languedoc dont 4000 à Nîmes ! M. de St Côme abjure secrètement, tandis que Nicolas Lamoignon de Bâville remplace Daguesseau ! Un dernier culte émouvant est présidé le 15 septembre par le Pasteur Cheyron qui exhorte à la résistance : « J’en atteste le Seigneur, devant qui je comparaîtrai peut-être aujourd’hui, car la mort plane sur nos têtes. Mais ô brebis d’Israël qu’Il m’a confiées ! Que dirai-je de vous au souverain pasteur des âmes, s’il me demande : qu’as-tu fait de ton troupeau ? Lui répondrai-je seigneur il m’a délaissé ? Ah ! Jurez-moi que vous resterez fidèle à Jésus Christ. » – « Nous le jurons » s’écria l’auditoire en larmes. Par précaution, le Consistoire ferme le temple le 16 septembre… Cheyron abjurera dès le 2 octobre avec son collègue Paulhan contre un poste de consul. Harcelé par ses fidèles qui crient au loup dès qu’ils voient ce berger indigne, Cheyron mourra peu après.
Le 1er octobre 1685, le nouvel Intendant et Noailles font leur entrée dans Nîmes avec trois régiments d’infanterie, et convoquent les notables protestants. Certains se soumettent, St Côme en tête ! Le 3 octobre, Bâville reçoit les abjurations dans la cathédrale à main levée ! Le temple est officiellement fermé dès le 16 octobre et gardé par la troupe. Le 19, l’édit de Fontainebleau révoque celui de Nantes et place deux millions de sujets du roi hors la loi.
En 1686, pendant qu’on démolit durant plusieurs mois le temple de la Calade, au frais des Nouveaux Convertis, les consuls proposent d’installer la cloche à Ste Eugénie. Mais l’évêque n’en veut pas à cause des inscriptions qui y figurent et elle sera finalement installée dans le beffroi de la maison commune de Calvisson ; elle y est toujours. En 1730, les ruines du temple seront données aux Sœurs des écoles royales et Jean Mauric aménagera de nouveaux locaux en appui sur les murs subsistants. Les sœurs y resteront jusqu’en 1831, sauf entre 1792 et 1811. La Municipalité installe à leur place une école communale et une école de musique puis, en 1781, une école d’enseignement professionnel pour l’industrie du tissage, suivi en 1933, d’un laboratoire municipal puis d’un foyer communal en 1936. Celui-ci étant occupé par la Milice le 2 mars 1943, le 12 novembre suivant, la résistance y fait sauter une bombe… Puis le foyer communal récupère ses locaux avant d’être transformé en Théâtre en 1952 !
Le « Petit temple » de Saint Marc
En 1601, une poutre du Grand temple menaçant de rompre, le Consistoire redemande la construction d’un second temple. Henri IV fait la sourde oreille car il ne veut pas modifier un équilibre qu’il sait fragile à Nîmes entre les deux religions. Il n’accepte que le 14 avril 1610, pour rallier le parti Huguenot dont il a besoin pour engager la guerre projetée contre les Habsbourg. Le couteau de Ravaillac l’en empêchera le 14 mai suivant…
Ce second temple sera rapidement construit « à la place de la maison Tazandier appartenant alors à Etienne Bertrand », le long du rempart, derrière le collège et attenant à celui-ci (actuel jardin du Muséum). On conserve le modèle du temple de la Calade mais en plus petit – il ne contient que 1000 personnes – et muni d’un clocher à l’ouest. Le pasteur Jacques de Chambrun le dédicace en 1611 avec ses collègues. Parmi ses futurs pasteurs, tous professeurs à l’Académie protestante voisine, trois seront tour à tour déplacés à Paris (au temple de Charenton) : Michel Le Faucheur, Samuel Petit, qui parlait couramment le grec, l’hébreu, mais également le syrien, le chaldéen et l’arabe… et le célèbre Jean Claude de 1656 à 1661 ! Plus tard le savant Cottelier y exerça son ministère avant d’être nommé par Colbert professeur de grec au Collège de France…
En 1652, les réformés obtiennent de Mazarin –mais verbalement- que le Collège soit coupé en deux : une partie pour les élèves catholiques avec les professeurs jésuites, et l’autre, l’ « Académie protestante » regroupant le collège protestant et l’académie de théologie. Ce nouveau collège protestant est construit, à leurs frais, de septembre 1653 à mars 1654, au Sud, parallèlement au petit temple. On y accède par un élargissement de la Grand’rue pratiqué à l’angle de la rue des Greffes. Pendant les travaux, les cours se déroulent dans le petit temple. Les thèses de doctorat sont cependant soutenues publiquement dans le Grand Temple.
En 1661, craignant les compromissions, le pasteur Claude déclare au synode provincial qu’il est impossible « d’unir la lumière avec les ténèbres et Jésus Christ avec Bélial » ; l’évêque Cohon le dénonce au roi : « les maux sans le secours de votre Majesté seront à jamais incurables ». Il obtient ainsi en février 1664, que Louis XIV donne la partie protestante du collège aux Jésuites, avec la fermeture de l’académie protestante par jugement du Conseil d’Etat d’avril et le départ du pasteur Jean Claude par arrêt du 6 août. Jusqu’à la Révocation, Claude devra continuer la polémique à Charenton tant avec les Jansénistes (le grand Arnaud et Nicole de Port Royal), qu’avec Bossuet !
La philosophie demeure enseignée au collège par tolérance du Principal jésuite, mais hébreu et théologie sont enseignés clandestinement dans le Petit Temple. Les Jésuites s’en plaignent et le Petit temple est donc détruit par arrêt du 28 novembre de la même année 1664 ! Des matériaux sont récupérés pour un agrandissement du grand temple, mais la bibliothèque dispersée.
Au Désert, sans temples ni pasteurs…
Pendant la période de persécution qui suit la Révocation, près d’un tiers de la communauté nîmoise s’est converti sincèrement tandis qu’un autre fuyait. Le tiers restant, tout en donnant les signes extérieurs de catholicité, continue de lire la bible en cachète, tous volets fermés, ou même se rassemble, malgré l’interdiction, dans différents lieux de la garrigue environnante, autour de prédicants improvisés tel le proposant Fulcran Rey. Dès le 21 février 1686 par exemple, vers 10h du soir, huit Nîmois d’une trentaine d’années sont arrêtés en train de chanter des psaumes dans une capitelle, près de la route d’Alès, à 2 heures de marche de la ville. Ils sont condamnés comme méritant « un châtiment exemplaire »… Mais malgré les arrestations, envois aux galères ou exécutions capitales, les rassemblements « au Désert » se multiplient un peu partout ! Ainsi, le 30 juin suivant ce sont 2000 personnes qui sont surprises par les dragons dans la carrière romaine de Barutel sur le chemin de La Calmette ; 40 sont pris. Le jeudi suivant deux autres assemblées sont surprises : l’une près du village de Saint Césaire (maison Huguet), l’autre à la Croix de fer. Massacres et supplices (flagellation et nez coupés pour les femmes !) se multiplient. Louvois précise : « Sa Majesté ordonne que tout ceux qui se trouvent dorénavant à de pareilles assemblées seront punis de mort », ou encore en 1688 : « Sa Majesté désire que vous donniez ordre aux troupes qui pourraient tomber sur de pareilles assemblées de ne faire que fort peu de prisonniers, mais d’en mettre beaucoup sur le carreau, n’épargnant pas plus les femmes que les hommes… »
Pourtant les cultes clandestins nocturnes se maintiendront pendant un siècle !! Des usages se codifient au cours du temps, sur les recommandations de Claude Brousson, puis de Pierre Corteiz et Antoine Court, reprises par Paul Rabaut ; tous prédicants puis pasteurs du Désert qui instituent ainsi une véritable résistance passive pour reconstruire l’Eglise « sous la croix ». Ils insistent sur le devoir de rendre à Dieu un culte religieux et public afin de souder la communauté et d’éviter un éclatement en multiples obédiences et dérives interprétatives. Véritables cultes qu’il convient de mener dignement d’où la nécessité de la robe pastorale pour la prédication, de chaires démontables avec disposition d’un parquet près de celles-ci sur lequel on distribue la Sainte Cène sous contrôle des Anciens. Hommes et femmes sont séparés et les enfants de moins de 12 an, non admis. On prie à genoux, on chante debout des psaumes malgré le risque de repérage qu’ils constituent ! Les collectes sont fréquentes pour les pasteurs et les victimes de la persécution… On tient parfois des séances de catéchisme et bientôt on célébrera baptêmes et mariages. On prend les précautions nécessaires : convocation secrète par le pasteur de passage en accord avec les Anciens du lieu, réseaux d’information, choix au dernier moment des lieux que l’on varie souvent, signes de reconnaissance, discrétion et usage de chemins détournés, disposition de sentinelles, usage de lampes sourdes, ne pas excéder 2h et demie et ne pas laisser de traces de rassemblement… Des mazets ou capitelles servent de sacristies improvisées pour stocker le matériel nécessaire au culte. Il faut se méfier des nombreux espions envoyés pour les dénoncer mais on envisage pourtant le martyr éventuel : « Ils seraient en devoir de souffrir patiemment, d’être fermes dans la foi, […] de répondre aux interrogations qui leur seraient faites avec tant de circonspection, qu’en confessant la vérité, ils ne puissent donner lieu aux ennemis de nuire à personne » (Synode de 1739).
Les « temples » du Désert nîmois
Autour de Nîmes certains lieux isolés semblent privilégiés, plus ou moins éloignés de la ville selon la sévérité des périodes de persécutions. Ainsi, sur la route d’Uzès, on rend jusqu’au Pont St Nicolas pour écouter Antoine Court en 1715 ! Sur celle d’Alès, il peut s’agir du mas Guiraudon ou du bois de Mitau avec son « creux de l’assemblée » comme en octobre 1745 avec Paul Rabaut. Sur la Route d’Anduze, on se réunit souvent près des mas de Granon, Ponge ou Servas ; sur celle de Sauve, près des mas de Gardies ou de Vaqueyrolles comme en décembre 1690 avec Paul Brousson, ou à la Baume des fées où Antoine Court faillit être pris dans la nuit du 14 au 15 janvier 1720. Sur la route de Sommières on se retrouve à Védelin, Cante-Perdrix, Puech Nuit ou même vers Langlade ou le bois de Bernis…
Même si les amendes sont maintenues, les persécutions diminuent à partir des années 1760. Une « clandestinité tolérée » s’instaure et les assemblées se rapprochent de la ville. L’hiver on se réunit à l’abri du mistral, dans une carrière du versant Sud de la colline de l’Ermitage, orientée vers le cadereau de Vaqueyrolles dans lequel on dresse la chaire ; le mazet proche des Bénézet sert de sacristie (c’est l’actuelle sacristie du Désert à l’extrémité du cimetière protestant). Cette zone a été défigurée depuis par les carriers et l’actuel chemin des écoliers. L’été on préfère s’assembler de l’autre côté de la colline, sur la rive droite du cadereau d’Alès, face au mont Cavalier. Cette vallée riche en carrières est isolée, l’actuelle route d’Alès n’existant pas alors ; elle passait par le chemin du mas de Balan. En décembre 1765, le Consistoire loue même à la veuve Noailles, la carrière de L’aicle ou Lecques, au pied du roc de l’écho, à droite de la montée de la route d’Anduze (actuelle chemin de la Cigale). « On arrivait dans cette place sombre et rarement échauffée par les rayons du soleil, par deux sentiers étroits ». Jusqu’en 1787, cette carrière fera donc office de « temple de Nîmes » pouvant accueillir plusieurs milliers de fidèles sur des blocs de pierre disposés en gradins ! C’est là que le 23 juin 1765, Paul Rabaut consacre son fils Jean-Paul dit Rabaut Saint-Etienne comme pasteur de Nîmes à ses côtés. Là aussi les lieux ont été bouleversés au XIXème siècle par l’exploitation des carrières et maintenant la construction d’immeubles !
Après l’Edit de Tolérance de 1787 qui règle l’Etat Civil des non catholiques mais non la liberté de culte, les assemblées « tolérées » se rapprochent encore et se tiennent dans l’Enclos Gaujoux, une propriété au pied de Canteduc, derrière le temple de Diane… là aussi on a disposé des pierres en gradins et les cultes, semi-publics, attirent de nombreux curieux. Autres temps !
Quand le Grand temple était l’église de Dominicains
Le premier couvent des Frères prêcheurs, à l’emplacement de l’actuelle église St Charles, avait été détruit après les Guerres de religion. Les Dominicains furent réinstallés à Nîmes par Louis XIII avec un nouveau couvent dans ce qui restait du château royal médiéval, en appui sur la porte d’Auguste. « Le conseil de ville accorde aux Révérends Pères Dominicains, une indemnité de 15 000 livres, à condition de construire leur nouvelle église sur l’emplacement de certaines maisons appartenant auxdits religieux, et faisant face à la place des Carmes, ce qui sera un ornement pour la ville » (Archives Départementales du Gard série H page 150). Jugée trop petite, une seconde église dédiée à St Louis, la remplacera, construite aux frais de municipalité (38 000 livres) plus au sud, le long du rempart.
Jean Mauric, architecte et sculpteur nîmois, en dresse les plans sur le modèle dit « jésuite » avec une façade au décor étagé en deux registres dont celui du haut plus étroit. Le 28 mars 1714, François Morel, Vicaire Général, pose la première pierre en présence de Jean Augustin Reynaud prieur, des consuls et d’une foule nombreuse ; elle porte une inscription latine : « à Dieu tout puissant et très grand ». Le mur Est de la nef correspond au rempart, les murs Nord et Nord-Est, au reste du château médiéval. Bénie le 7 mars 1729, l’église ne sera terminée qu’en 1747 par suite de difficultés financières. Dès 1715 cependant, les Dominicains avaient demandé au sieur AIGON, menuisier, les boiseries du chœur faites selon les dessins de François Louis GADET, religieux de l’ordre, en telle sorte que : « toute la sculpture marquée sur le plan d’élévation : agrafes, feuilles, rocailles, volutes, chapiteaux, culs de lampe et autres sera dans le bon goût et relief, selon l’ordre et les règles de la sculpture, que les quatre colonnes et leurs pilastres soient réglés sur l’ordre composite, cannelés et flutés, conformément au plan d’élévation ». L’arrondi des tribunes et les piliers témoignent encore de ce style baroque-languedocien retrouvé dans les chapelles des Jésuites ou des Ursulines. Un autel de marbre est sculpté par Barata…
Ce nouveau couvent dominicain ne sera jamais très florissant ; il sera même transformé en hôpital militaire de 1747 à 1749 pour y accueillir des soldats espagnols blessés après les défaites de 1746 puis le retrait d’Italie des troupes françaises et espagnoles face aux Autrichiens. En mars 1789, L’Eglise Saint Louis sert de salle de délibération pour la préparation des Etats Généraux aux délégués du clergé de l’évêque Cortois de Balore, puis les rares Dominicains l’abandonnent après l’émeute de 1790.
Pillée, boiseries sculptées arrachées, autel démonté, elle fut saisie comme bien national en 1791 comme la plupart des biens du clergé, pour garantir la valeur des assignats. De même pour le couvent, affecté à la gendarmerie en 1793, jusqu’à son déplacement près de la nouvelle Préfecture en 1872.
Quand le petit temple était la chapelle des Ursulines
Le Petit temple fut pendant près d’un siècle, le lieu d’enfermement de petites protestantes arrachées à leur milieu familial. C’était en effet la chapelle du couvent des Ursulines, un ordre italien fondé en 1537, introduit en France par Marie de Médicis et se consacrant, au départ, à l’éducation catholique des jeunes filles pauvres de bonnes familles.
En 1636, Anthime Cohon, nommé évêque de Nîmes par Richelieu, demande à l’archevêque de Lyon, frère du cardinal, de lui envoyer une dizaine d’Ursulines qui sont installées dès mars 1637, rue des Ecoles vieilles, puis rue de la Bouquerie en 1641, dans un couvent aménagé dans une partie de la « grande maison médiévale Scatisse», propriété d’une famille de drapiers protestants qui doit céder la place ! Les Ursulines « accueilleront » désormais des petites filles de Nouveaux Convertis jugées en danger moral ! 40 religieuses s’occuperont bientôt de plus de 20 pensionnaires. En 1685, le registre des abjurations est tenu à disposition des Nîmois dans la chapelle Saint-Joseph de ce premier couvent pour permettre aux protestants de venir le signer à l’abri des regards de leurs coreligionnaires.
Après la Révocation, des petites filles prises dans les assemblées clandestines ou de familles refusant d’abjurer, leur sont systématiquement retirées dès l’âge de 7 ans et, à Nîmes, enfermées chez les Ursulines pour y être éduquées catholiques de force et mariées ensuite à d »‘Anciens Catholiques » chargés de contrôler leur foi… A ce régime le couvent devient rapidement trop petit ! On en construit donc un autre de l’autre côté de la rue, un peu plus au N et bordant l’Agau, canal encore à ciel ouvert à l’époque. Ce sera le Grand Couvent, construit à grand frais (ce sont les Nouveaux Convertis récalcitrants qui payent !) et terminé en 1725. Puis l’on abandonne le premier devenu vétuste, pour élargir la rue en 1746. Toujours trop petit, le couvent est prolongé en 1752 par un autre bâtiment, au delà de l’Agau ; on prend soin de le relier au précédent par un pont couvert, pour éviter de faire passer les petites prisonnières par l’extérieur de peur qu’elles ne s’échappent…
La chapelle elle-même est construite par Claude Delort et Jacques de Paulet. La première pierre en fut posée en 1714 par le vicaire général, en présence de la mère supérieure de Verez. Inaugurée par l’évêque de La Parisière le 5 avril 1718, cette chapelle élégante était le seul lieu où les petites captives pouvaient apercevoir leurs parents à l’occasion des messes, du moins de celles ouvertes au public par la rue du Grand couvent ; religieuses et pensionnaires accédaient par la chapelle latérale droite et une grille dressée sur toute la hauteur séparait la nef –publique- du Chœur et des chapelles, afin d’éviter tout contact…
Cette chapelle, d’un beau style baroque provençal conserve une grandeur classique apportée par de nombreux pilastres. En 1752, on y installe un orgue superbe, œuvre de Joseph Isnard ou plutôt de son oncle, Jean-Esprit, frère convers dominicain de Tarascon contemporain de Joseph Cavaillé. En effet Joseph n’avait alors que 12 ans tandis que Jean-Esprit réparait le grand orgue classique avec bombarde en Raisonnance de la cathédrale Saint Castor ! Le buffet d’origine en noyer sculpté, à trois tourelles, est classé Monument historique depuis le 18 août 2010. Pourvus de 22 jeux, les tuyaux d’orgues durent être restaurés en 1891. Notons une particularité peu commune (prémonitoire ?) : l’orgue est placé au dessus du chœur comme dans les temples luthériens ! La Révolution saisit le couvent comme bien national.
Deux chapelles pour un temple !
Les temps troublés de la Révolution vont permettre à nouveau l’exercice du culte réformé, mais ce ne sera pas sans difficultés. En 89, tout semble pourtant aller pour le mieux. Etienne-David Meynier de Salinelles, membre du Consistoire, et le pasteur Rabaut Saint-Étienne désignés par Nîmes comme Député du Tiers-Etat pour la sénéchaussée de Beaucaire se retrouvent dans l’assemblée nationale Constituante le 17 juin. On sait le rôle essentiel de Saint-Etienne dans la rédaction de l’article X de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses » voté à 4h du matin, le 30 septembre ! Le pluralisme religieux se trouvait ainsi reconnu de fait !
Dès novembre, couvents et églises sont confisqués comme « Biens nationaux ». C’est le cas de la chapelle St Louis des Dominicains, et de celle du Grand Couvent des Ursulines. En juin 90, « les Bagarres de Nîmes » entre catholiques et protestants font 400 morts et la Constitution civile du clergé envenime encore plus la situation. En octobre 1791, Meynier de Salinelles devient Président de l’administration du département du Gard et la nouvelle Assemblée législative siège aux Tuileries avec des notables Girondins qui veulent « conserver les acquis de la révolution sans pour autant céder davantage au populaire. »
Fin 1791, la situation semblant stabilisée, le Consistoire cherche un local pour célébrer le culte réformé. L’autorité départementale accepte de lui louer la chapelle dévastée des Dominicains. On l’aménage au mieux et inscrit au-dessus de la porte : « Edifice consacré à un culte religieux par une société particulière. Paix et Liberté. 1792 ». Le 20 mai, alors que la guerre menace, on y célèbre le 1er culte officiel depuis la Révocation, en présence de la municipalité et de quelques autorités civiles ! C’est le vieux pasteur clandestin de Nîmes, Paul Rabaut qui, perclus de rhumatismes, le préside. Que d’émotions après 40 ans d’un ministère exceptionnel sans cesse menacé ! Le Consistoire décide que baptêmes comme mariages ne doivent plus se célébrer dans les maisons particulières mais au grand jour au temple. Pourtant, les cultes sont peu fréquentés car on préfère les cultes familiaux ; les pasteurs doivent s’adapter…
Les évènements se précipitent : défaites militaires, arrestation du roi et élection d’une Convention républicaine fin septembre pour le juger. Le Montagnard, Jean-Antoine Courbis, est élu en novembre Procureur-Syndic du district de Nîmes ! Pourtant, début 1793, Meynier de Salinelles devient maire de Nîmes tandis que son collègue au Consistoire Alexandre Vincens, Juge au tribunal Civil et fils de négociant en soie, achète en assignats des Biens nationaux mis en vente, dont une part du Couvent des Ursulines, notamment sa chapelle pour 22.611 livres 18 sols t 9 deniers, le 5 février. Après quelques aménagements la rendant plus confortable que la chapelle des Dominicains, Vincens-Valz (du nom de sa femme) la met à disposition du Consistoire pour y rassembler des cultes.
Mais début juin, menacée par les Sans-culottes, la Convention accuse les Girondins. Après une courte révolte fédéraliste, Courbis prend le pouvoir à Nîmes, fait arrêter Meynier de Salinelles en septembre et décrète la Terreur. Prudent on ferme les temples et retrouve la clandestinité ! La plupart des notables protestants sont guillotinés et seul Vincens-Valz sauve sa tête contre de fortes amendes…
Enfin reconnus… et avec deux temples !
Courbis, arrêté après Thermidor (27 juillet 94) est massacré par la foule dans la citadelle en mai 1795. Dans l’intervalle, Le décret du 21 février 1795 (3 ventôse An III) abroge la Constitution civile du Clergé et institue la première Séparation des Eglise et de l’Etat : chaque culte doit pouvoir s’exercer en liberté mais d’une façon strictement privée. « Art. VII – Aucun signe particulier à un culte ne peut être placé dans un lieu public, ni extérieurement, de quelque manière que ce soit. Aucune inscription ne peut désigner le lieu qui lui est affecté. Aucune proclamation ni convocation publique ne peut être faite pour y inviter les citoyens ». *
Malgré l’hostilité du catholicisme qui, à Nîmes, déclenche la Terreur Blanche faisant de nouvelles victimes, un équilibre s’amorce. Jean-Jacques Vincens-Valz, le fils d’Alexandre, élu maire pour un an en mai 1795, ouvre sa chapelle pour un premier culte réformé privé le 13 août, mais pour ce qui reste d’une communauté bien affaiblie par cette période troublée… Ce sera le « Petit Temple affecté au culte réformé avec accord du propriétaire ». Pendant le Directoire, des cultes privés s’y maintiendront, mais peu suivis.
Le 26 messidor an IX (15 juillet 1801) le premier Consul avait négocié un Concordat avec le pape. Le 18 germinal an X (8 avril 1802), il conviendra avec les Eglises réformées d’Actes organiques secrets qui définissent les paroisses et le nombre de pasteurs qui y sont affectés, 4 pour Nîmes dont le pasteur Olivier-Desmont. Sous contrôle de l’Etat, ceux-ci sont formés, nommés et payés par lui, comme les prêtres mais les synodes sont interdits. Le Consistoire réclame alors un deuxième temple. Bonaparte ne donne pas suite, mais confirme l’affectation de l’ancienne chapelle des Ursulines au culte protestant et autorise d’y ériger une cloche de 15 quintaux au-dessus du porche. Celle-ci porte l’inscription : « O Sion ! Ton Dieu est d’âge en âge Ps 146. Les réformés de Nîmes ont fait fondre et monter cette cloche sous le consulat de napoléon Bonaparte, restaurateur de la liberté chrétienne, l’an XI de la république française, de Jésus Christ 1802 » et est signée par le fondeur : « Barbut m’a faite. » Vue la fragilité de son clocheton elle est désormais muette.
A Nîmes, il faut cependant attendre 1803 pour avoir un deuxième temple comme en témoigne le 22 septembre, un extrait des registres des délibérations du gouvernement de la République (St Cloud 5ème jour complémentaire an XI de la République) :
« Le gouvernement de la République sur le rapport du ministre des finances, arrête :
- Article 1 : Le préfet du département du Gard est autorisé à mettre à la disposition des Protestans de Nîmes, l’église des Pères du Château, dits Dominicains, de cette ville pour l’exercice de leur culte, à la charge pour eux d’y faire les réparations nécessaires
- Article 2 : le ministre des finances est chargé de l’exécution du présent décret
Le Premier Consul, signé Bonaparte. Le secrétaire d’état, signé Hugues B Marie pour copie conforme, le ministre des finances signé Gaudin, Pour copie conforme signé J. B. Dubois »
Le petit temple actuel
Ce temple, le seul disponible depuis 1795, deviendra le « petit temple » quand, fin 1703, le « grand temple » sera définitivement installé dans l’ancienne chapelle des Dominicains. Des cultes se tiennent régulièrement dans les deux temples durant le premier empire, présidés par des pasteurs dûment nommés par l’empereur et, désormais, devant un public fourni de fidèles enfin reconnus par le pouvoir… C’est pourtant sur les marches du Petit temple qu’ont lieu pendant la « terreur blanche » de 1815, le dernier acte d’intolérance contre les réformés, molestés à la sortie du culte avant que le temple ne soit mis à sac… Puis les esprits se calment et les cultes reprennent sous la Restauration.
Par acte notarié devant Me Bordarier le 23 avril 1831, Elisabeth Vincens-Valz, la sœur héritière de Jean-Jacques, donne le bâtiment au Consistoire On utilise comme chaire, une chaire du Désert, en 5 panneaux démontables reliés par des gonds ; elle a été transportée depuis dans la chapelle du Désert dans le cimetière protestant. Une Bible du XVIIIème fut également placée sur la table de communion. En 1837, sont fixées sur le mur les Tables de la Loi que sa donatrice Mme Olivier Martin avait fait graver par M Tourre en 1823 pour le Grand temple ; les trouvant trop petites, elle les fait déplacer ici !
Pour 6 000 F, Elisabeth Vincent-Valz a acheté en 1836, la maison d’école à l’arrière du temple qu’elle donne également au Consistoire pour en faire un presbytère ; c’était une partie de l’ancien couvent dont on remanie la structure et la façade sur la rue Brousson avec l’aide de la municipalité, de 1848 à 1856. C’est l’actuelle maison du protestantisme, restaurée en 1979, inondée en 88 ! Notons que la partie sud du couvent sera détruite lors du percement de la rue du Général Perrier en 1876 ou transformée en appartements.
En 1846 on procède à une restauration importante du temple et de son mobilier : bancs en noyer, œuvre de M Duprat menuisier, portes et lambris également en noyer, plancher pour recouvrir le pavage d’origine. Puis l’orgue de 22 jeux est entièrement restauré en 1890 (seul le buffet d’orgue est d’origine).
Etant propriété privée avant le Concordat, la loi de séparation des Eglises et de l’Etat laissera donc ce temple propriété du Consistoire en 1905. Le monument sera classé Monument Historique, intérieur comme extérieur, par arrêté du 22 février 1964 et la façade sur rue, restaurée avec soin. Pourtant, en 1975, une voûte du temple menaçant de s’affaisser, on doit la consolider par des tirants métalliques, et les inondations de 1988 endommagent le plancher qui doit être refait… Un projet d’aménagement en espace culturel et muséographique est à l’étude.
Le Grand temple actuel
Le premier Consul donne donc ce grand local au Consistoire réformé de Nîmes en septembre 1803, mais dans quel état ! Désaffectée depuis près de 10 ans celui-ci était devenue une sorte de grange où était entreposé le fourrage nécessaire aux chevaux de la gendarmerie logée à côté dans l’ancien couvent ! Il faut donc commencer par tout remettre en état, en partie avec les deniers des fidèles. Des modifications importantes sont apportées : destruction des aménagements agraires, dépose des débris d’autels. On ne conserve que 4 chapelles latérales sur 8 dans lesquelles on aménage des tribunes ; s’ils existent encore, les quelques vitraux restant sont retirés pour laisser entrer la lumière dispensée avec parcimonie par des fenêtres hautes. Les murs sont badigeonnés de chaux et l’on installe progressivement le mobilier intérieur. En 1804 un mur vient masquer le chœur de l’église transformé en sacristie, mur devant lequel on élève, au centre, une haute chaire en bois sculptée avec escalier d’accès, portillon et abat-son ; celui-ci était précieux pour le prédicateur, en cette époque où la sonorisation n’existait pas ! Olivier-Desmont quitte alors le petit temple pour le Grand…
En 1814, par analogie sans doute au petit temple car, contrairement aux Luthériens, la coutume n’était pas encore habituelle dans le monde réformé, on demande aux facteurs d’orgue d’Avignon Pierre Martin et Chaves de construire un instrument somptueux sur la tribune recouvrant la sacristie, derrière la chaire. Celui-ci était semble-t-il destiné à l’origine à N.D. des Doms ! Il est achevé en 1821.
En 1823, Mme Olivier Martin, une riche paroissienne qui fera plusieurs dons à l’Eglise (dont un terrain pour agrandir le cimetière) fait graver et placer dans le temple deux panneaux de marbre noir figurant les Tables de la Loi. Comme elle les juge trop petites, elle préfèrera les transférer au Petit temple en 1827, et en fera placer d’autres ici, nettement plus grandes ; elles y sont toujours !
La plupart des bancs de chêne actuels ont été fabriqués en 1841 par le maitre menuisier Jean-André Duprat (comme au petit temple) et en 1843, on fait sculpter sur la façade au-dessus du porche une Bible sculptée sur la façade. D’allure très sobre et solennelle, le grand temple peut ainsi contenir 650 places (500 dans la nef, 60 sous les tribunes et une centaine au-dessus… )
Vers 1850 le consistoire achète d’occasion un orgue à deux claviers placé sur le précédent puis vers 1870, un troisième clavier de 42 notes, installé par Cavaillé-Coll. On électrifiera ensuite la soufflerie. Plusieurs réparations ont déjà été effectuées, notamment par la manufacture languedocienne de Lodève, mais d’autres sont encore nécessaires.
La loi de séparation des Eglises et de l’Etat obligeait les églises à reconnaître la propriété de l’Etat sur les locaux qui leur avaient été donnés depuis le concordat ; contrairement au petit temple, c’était donc le cas du grand temple, murs, portes, voûte du plafond et toiture de l’édifice. L’ensemble est d’ailleurs inscrit à l’Inventaire des Bâtiments de France depuis le 19 mars 1964, et la municipalité vient de refaire toute la toiture qui en avait bien besoin. L’Eglise n’a que l’usufruit du bâtiment avec à sa charge l’entretien intérieur : orgues (non classés au MH), mobilier, chauffage, éclairage et sonorisation. Un grand temple bien difficile à chauffer et souvent surdimensionné, mais cependant bien utile pour les grandes fêtes carillonnées et les nombreux concerts qui y sont donnés, tant par l’Eglise que la municipalité ou certaines associations.
Le temple de Saint Césaire
Jusqu’en 1960, Saint-Césaire était un village rural et agricole. Au XIème siècle –la date de 1019 est avancée, d’où le millénaire prévu pour cet été – il s’agit d’un petit hameau d’allure provençale, au pied d’une colline surmontée de son moulin, et regroupé autour d’une source pérenne (« Font-Césarine » d’où le puits et la place du Griffe). Une petite église romane est dressée, dédiée à l’évêque d’Arles Saint Césaire ; elle possède un joli chevet orné d’une arcature portée par des petits culots à motifs géométriques variés, et surmonté d’une corniche biseautée caractéristiques de cette époque.
En 1820, encore environné d’une vaste zone vallonnée de vignes et d’oliviers, St Césaire-lès-Nîmes est déjà rattaché à Nîmes et comprend environ 400 protestants soit ~3/4 de la population. Ceux-ci, bien éloignés du Petit temple, désirent donc y bâtir un temple. Après autorisation préfectorale, on ouvre une souscription : les habitants versent plus de 5.000 francs-or. Les 2000 francs complétés par la commune de Nîmes permettent la construction d’un édifice par l’architecte départemental. Le 9 avril 1822, le pasteur Samuel Vincent et une députation du Consistoire de Nîmes posent la première pierre et le 16 mai 1823, le temple est inauguré !
« Le Temple est de forme elliptique, et la chaire occupe l’un des foyers de l’ellipse. L’expérience a prouvé combien cette forme est favorable à la propagation de la voix (…). L’ellipse a huit toises trois pieds de longueur (~16m) et cinq toises deux pieds de largeur (~11m). Il y a une tribune au-dessus de la porte d’entrée, qui n’interrompt point la forme elliptique, parce que, dans cette partie, l’ellipse passe à plus d’une toise de la façade, et laisse un vestibule entre les deux portes d’entrée, et un petit salon de chaque côté, dont l’un renferme l’escalier qui mène à la tribune. Ainsi la tribune ne sort pas de la ligne elliptique, et occupe, par-dessus le vestibule et les salons, tout l’intervalle entre l’ellipse et la façade. Au dessus de la tribune, l’entablement, toujours elliptique, est porté par deux pilastres et deux colonnes. Les deux petits coins du côté de la chaire servent de vestiaire et de dégagement pour les membres du Consistoire. (…) Le Temple est élevé de quatre toises deux pieds au-dessus du sol, et éclairé par trois demi-lunes. » Il est qualifié de « simple mais non dépourvu d’élégance ».
Une paroisse est donc créée avec son Conseil de paroisse, des cultes dominicaux, des rencontres de catéchisme… cependant, desservie par les pasteurs de Nîmes, on ne prévoit pas de presbytère. Un rapprochement avec la paroisse de Milhaud est tenté pendant quelques années avant de revenir dans le Consistoire nîmois. Dès 1837 une école protestante est construite qui peut accueillir cent élèves… En 1845, la ligne de chemin de fer Nîmes – Montpellier est inaugurée avec une gare à Saint Césaire, centre d’urbanisation d’un nouveau quartier. Construit pendant la période concordataire, le temple devient donc propriété de l’Etat en 1905.
La deuxième moitié du XXème siècle va bouleverser ce territoire : aménagement de la zone industrielle et urbanisation importante avec construction des ZAC de Pissevin et Valdegour… Le village de Saint-Césaire compte maintenant environ 7000 habitants avec seulement une minorité protestante. De nouveaux projets d’église concerneront donc ce secteur ouest…
Le premier temple de l’Oratoire
Au XIXème siècle, en plein développement après l’arrivée du Chemin de fer, Nîmes est en passe de devenir la première ville industrielle du Languedoc. Sa population grossit de nombreux paysans venus s’embaucher comme ouvriers dans l’industrie textile. Parmi eux surtout des gavots catholiques venus d’Auvergne, mais aussi des protestants des Cévennes, du Tarn ou du Vivarais. Les premiers s’installent plutôt dans les faubourgs N et E ; les seconds à l’Ouest dans la « Petite Genève ». Le 3 novembre 1853, après plusieurs tentatives, le Consistoire redemande à la municipalité la construction d’une école des filles en plus de celle des garçons, ainsi qu’un nouveau temple dans ce quartier populaire de la Placette. Un premier projet d’école est ajourné en 1854, faute de financement ; on se contente d’installer une petite école de filles dans le pavillon Est de l’ancien marché aux bœufs.
Le consistoire proposant de la financer, la municipalité accepte en 1856 de construire l’école projetée et le 6 mai, le Conseil Municipal vote l’adjonction d’un Oratoire – ce qui ne préjugeait pas d’un nouveau poste pastoral – sur l’emplacement de l’ancien abattoir aux porcs qui avait été transféré rue du Mail. Chambaud, architecte de la ville, conçoit un édifice octogonal de 600 à 700 personnes assises, accolé à la nouvelle école de filles. Le maire Jean Duplan en pose la première pierre le 25 août 1857. Le creusement des fondations révèle une céramique romaine et l’on doit arrêter le chantier un an plus tard ! Après plusieurs modifications de projets en cours de construction et contre l’avis du directeur des travaux publics de la ville, (façade et hauteur ou forme générale), puis allongement de la nef (1859), rajout de tribunes, la construction ne se termine qu’en 1865, pour une inauguration le 29 novembre 1866 ! Toutes ces modifications avaient fragilisé la structure d’origine (portée de voûte excessive) et de plus l’acoustique s’avéra mauvaise !
Dès 1864 les avocats Louis Laget, Penchinat, et les docteurs Pleindoux, Carcassonne avaient fondé des œuvres scolaires laïques. Très surveillée par la loi sur les libertés publiques de 1868, l’opposition républicaine nîmoise se conforte dans la défense de l’enseignement public délaissé et, soutenu par les Réformés, Jean Macé vient fonder une antenne de la Ligue de l’Enseignement. En 1869, deux salles de classe pour garçons et un réfectoire sont adjoints à l’arrière du nouveau temple ; le 29 juillet, une réunion électorale s’y tient et tourne mal après provocation policière. « L’affaire de l’Oratoire » remonte jusqu’à Paris et donne une belle occasion au préfet pour fermer école et Oratoire pour raison de sécurité !
L’actuel temple de l’Oratoire
Après fermeture du premier édifice en 1869, Alphonse Granon, le nouvel architecte de la ville, est chargé de renforcer et reconstruire partiellement le temple. En janvier 1870 son devis est approuvé, tenant compte des remarques sur l’acoustique et du souhait du consistoire de voûter l’édifice en conservant la hauteur des façades. Une voûte en pierre se révélant trop lourde pour les murs et trop onéreuse, Granon opte pour des arcs en fer qui, « tout en ayant l’avantage de la légèreté, n’avaient pas le désavantage de la poussée et se prêtaient à la construction de la voûte demandée », qu’il associe à des petites voûtes de briques tubulaires. A la suite de Victor Baltard cette conception est révolutionnaire pour l’époque ; Charles Garnier en avait fait quelques essais pour son opéra parisien, et Eiffel adopte tout juste ce principe pour construire la gare de Verdun ! Mais à peine les travaux commencés, la guerre éclate et Granon est mobilisé fin 1870. Son remplaçant voulut revenir à la conception traditionnelle d’une voûte en pierre. A son retour Granon est donc obligé de changer les proportions pour intégrer des piliers métalliques et mettre la maçonnerie en harmonie avec les arcs en fer. En 1872, alors que le chantier n’est pas terminé on y accueille symboliquement pourtant le premier synode national réuni à Nîmes depuis la Révocation !
Un devis supplémentaire avec nouveau budget doit être voté en 1873 et son projet finalement adopté par le conseil municipal et adjugé. Le préfet ne l’accepte qu’en 1874, alors que les travaux sont presque terminés… Seul l’entêtement d’Alphonse Granon permet donc que le Temple de l’Oratoire soit doté de cette charpente métallique qui fait son originalité. Une nouvelle inauguration eut lieu en 1876.
Le 21 avril 1881, le préfet chasse sous 48h les religieux des écoles communales pour les remplacer par des laïcs. Déjà laïcisé et souvent gratuit, le conseil presbytéral abandonne volontiers sa tutelle morale sur ses écoles consistoriales… En 1882, la municipalité construira une école publique place de l’Oratoire, puis un cours supérieur pour les jeunes filles.
Lors de la loi de Séparation de 1905, l’Oratoire et ses écoles, construits par l’Etat – bien qu’avec une forte participation financière du Consistoire -, deviendront sans contestations propriété de l’Etat. Le Consistoire n’en conserve donc que l’usufruit comme pour le Grand temple ou St Césaire.
POUR MEMOIRE
GRAND TEMPLE : ancienne église dominicaine édifiée entre 1714 et 1736, dans le style baroque,elle est mis en vente comme Bien National au début de la Révolution. Loué par le Consistoire pour le culte réformé en 1791, le Grand Temple est consacré par Paul Rabaut le 26 mai 1792. Mis définitivement à disposition du Consistoire par le Consulat en 1802, il est appelé ainsi en souvenir de l’ancien temple de la Calade détruit après la révocation de l’Edit de Nantes de 1685. Les orgues sont installées en 1821 et les Tables de la Loi en 1822.
PETIT TEMPLE : la chapelle du couvent des Ursulines fut réédifiée de 1714 à 1718. Elle fut également achetée par Alexandre Vincens-Valz qui la loua au Consistoire.Le premier culte y fut célébré le 13 aout 1795. Devenue le second temple de Nîmes, appelé « Petit Temple », en souvenir de celui démoli en 1664 situé à côté du Collège des Arts. Le Petit temple fut donné par la veuve de François Valz au consistoire en 1831. Les Tables de la Loi sont scellées en 1837. L’orgue actuel est monté en 1890. il est classé au Monuments Historiques.
TEMPLE DE L’ORATOIRE : le Temple fut élevé en 1857 sur l’emplacement d’un ancien marché aux boeufs, pour répondre à l’augmentation de la population protestante ouvrière du textile du Faubourg St Antoine.. Suit à des défauts de toiture, l’architecte de la ville Alphonse Granon le reconstruisit avec une charpente métallique qui fait son originalité. Il fut rendu au culte dès 1876.