Corbeau ou colombe ?

Dans cette célèbre histoire, un animal est un peu laissé -pour -compte : le corbeau. Nombreux sont ceux qui ignorent sa présence dans le récit et sa pré-séance à la colombe . Les artistes à travers l’histoire de l’art ont-ils boudé cet oiseau ? A moins que ce ne soit les théologiens qui n’auraient eu d’yeux que pour la colombe, considérée -malgré elle- comme  la star du bateau ?
Où est passé le corbeau ? Pourquoi quelques mots à son sujet et puis  plus rien, le voilà qu disparait des écrans-radar..
Faisait-il « tache » dans le paysage? N’était-il pas assez beau ? Mais alors  pourquoi ceux qui  nous ont rapporté  le récit du Déluge ne l’ont pas effacé ? S’ils l’ont gardé dans le texte, c’est bien pour une raison ! Considéré comme un animal impur dans la culture du proche-orient ancien, le corbeau n’avait peut-être pas bonne réputation mais il faisait partie de l’arche ! Noé l’a fait sortir en premier. Envoyé en éclaireur ? Ballon d’essai ?
Le corbeau fait d’incessants va-et-vient. Traduction littérale : « Il s’envola, allant et venant ». Hésitant, volontaire, un brin sceptique  (?), il volette et bégaye. Et s’il nous ressemblait ? Il ne trouve rien, il cherche, essaie encore, continue, « allant et venant » : il hésite mais il y va ! C’est un pessimiste actif. Dans ses allers et venues à la surface des eaux jusqu’à ce que la terre soit devenue sèche, il représente  l’effort de rendre le monde vivable.

Ainsi, dans ce récit du Déluge, chacun a une place dans les efforts de paix, même ceux qui n’en ont pas l’air ou qui balbutient. Comme le corbeau. Même s’il ne fait que passer, il est là comme pour dire : les efforts de vie, de paix passent par tous ceux qui sont de bonne volonté,  même s’ils ne « réussissent » pas du premier coup.  Et de ce fait, le corbeau donne toute son importance à la colombe qui le suit. Il lui ouvre la voie. Et, ne l’oublions pas : elle ne « réussit » pas tout de suite non plus. Elle rentre aussi bredouille une première fois.
Mais certains détails du récit  sont à relever : après son premier échec,  la colombe revient vers lui, c’est-à-dire vers Noé. Deux fois elle se  pose sur la main de Noé son maitre. Elle n’est pas supérieure au corbeau, simplement elle prend appui sur son maitre, elle compte sur lui. « Confie à Dieu sa route », dit un de nos cantiques. La colombe est une pratiquante reliée à un autre alors que le corbeau semble vouloir se débrouiller par lui-même. Son 2ème départ du bateau l’a fait entrer dans la Grande histoire :
« La colombe revint vers Noé sur le soir, et dans son bec une branche d’olivier » (Genèse chap 8, verset 11).
Voilà un minuscule verset qui a fait le tour du monde : la colombe a fait carrière. Malgré elle.  Emblême des Nations Unies, elle est depuis longtemps le symbole universel de la paix.
Le récit biblique nous montre une colombe qui a dû revenir deux fois avant de pouvoir se faire porteuse de bonne nouvelle. Et aujourd’hui : où en sommes nous ? Où la colombe de la paix pourrait-elle se poser ? Où trouvera t-elle  un accueil favorable ? Dans ce monde devenu « maboul » (c’est le sens du mot « déluge » en hébreu !), en proie à la montée des eaux, au réchauffement climatique, au chaos des guerres et destructions multiples, on peut se demander si la colombe de la paix n’en est pas qu’à son premier voyage…
Où pourrait-elle se poser ? Où trouvera t-elle un accueil favorable ? Où est la terre « promise » ? une terre humaine, respectueuse de son environnement, une terre qui cherche la justice, et qui, au lieu du pillage, pratique le partage ? Et nous, quand nous n’arrivons plus à envisager l’avenir, à qui nous confions nous ? Sommes -nous corbeau ou colombe ?
Il nous arrive de battre de l’aile à nous aussi, de ne pas trouver un seul rameau d’olivier. Le découragement n’est jamais très loin et la tentation de tout laisser tomber nous guette souvent. Mais si, au lieu de dire « à quoi bon « ? au lieu de nous arrêter au premier essai, on persévérait ?  Il nous faut, comme la colombe de Noé, s’accorder un temps de ressourcement dans Sa main pour que, fortifiés par Sa tendresse, nous puisions des forces nouvelles avant de reprendre notre élan vers un nouveau départ. « Va avec la force que tu as », nous murmure cette voix , « va, vole et vis de toute ton âme ».

Au 2ème voyage ce n’est pas un olivier que la colombe ramène. Ce n’est pas l’arbre de la paix réalisée et de la justice accomplie : non ! Ce n’est même pas une branche : c’est une « feuille fraîche d’olivier » dit le texte. Oui, vous avez bien entendu : une feuille ! Ce n’est peut-être pas grand-chose, mais c’est le signe que la vie est possible, que la paix est possible, que la justice est possible. C’est la voie ouverte à l’espérance envers et contre toute attente.

Extraits de la prédication du pasteur  Titia Es-SBANTI  du culte inter-génération du  14/09/2019

Texte biblique de référence :  Genèse 6 à 9 (extraits, adaptation pour les enfants)

…La violence et la méchanceté des hommes se multipliait sur la terre (..) .Le Seigneur  en fut attristé et regretta d’avoir fait les hommes sur la terre(..). Il dit : « J’effacerai de la surface du sol les hommes que j’ai créés, et même les animaux, grands ou petits, et même les oiseaux(..).Mais Noé trouva grâce aux yeux du SEIGNEUR.(…) C’était un homme juste, intègre parmi sa génération, un homme marchait avec Dieu.Le Seigneur  dit à Noé : « Construis-toi une arche en bois  solide; tu l’enduiras de goudron à l’intérieur et à l’extérieur. Tu le recouvriras  d’un toit et sur le côté, tu aménageras une porte. Quant à moi, je vais faire venir le déluge sur la terre, pour anéantir tout ce qui vit. (..)Mais je ferai alliance avec toi. Tu entreras dans l’arche, toi, tes fils, ta femme, et les femmes de tes fils. Tu feras aussi entrer un couple de chaque  être vivant, un mâle et une femelle, pour les garder en vie avec toi. Procure-toi donc toutes sortes de vivres, fais-en des provisions, pour que vous ayez de quoi manger, eux et toi”. Noé exécuta tout ce que le Seigneur lui avait ordonné. (…) Il se mit à pleuvoir sur la terre. Ce jour-là Noé entra dans l’arche avec les siens. le Seigneur ferma la porte derrière lui. La grande inondation sur la terre dura pendant 40  jours. L’eau monta et souleva  l’arche qui s’éleva au-dessus de la terre.(…) L’eau monta de plus en plus, et recouvrit toutes les hautes montagnes… Tous les êtres vivants moururent.… il ne resta que Noé et ceux qui étaient avec lui dans l’arche. (…)Dieu se souvint de Noé, de tout vivant, de toute bête avec lui dans l’arche . Il fit alors souffler un vent sur la terre et l’eau commença à baisser. (…) Au bout de 40 jours, Noé ouvrit la fenêtre de l’arche qu’il avait faite. Il lâcha le corbeau et celui-ci sortit , faisant des va-et-vient -il fallait attendre que l’eau se résorbe sur la terre. Puis Noé lâcha la colombe pour voir si le niveau de l’eau avait baissé. Mais la colombe ne trouva pas où poser la patte ; elle revint à lui vers l’arche car les eaux couvraient toute la surface de la terre. Noé tendit la main et la prit pour la faire rentrer dans l’arche. Il attendit encore 7 autres jours et lâcha à nouveau la colombe hors de l’arche. Sur le soir elle revint à lui, et voilà une feuille d’olivier dans son bec ! Noé sut ainsi que les eaux avaient baissé sur la terre. Il attendit encore 7 autres jours et lâcha la colombe qui ne revint plus vers lui. (….) En l’an 601, au premier jour du premier mois, il n’y eut plus d’eau sur  la terre. Noé retira le toit de l’arche et constata  que la surface du sol avait séché.Alors Dieu dit à Noé : Sors de l’arche, ainsi que ta femme, tes fils et tes belles-filles. Fais sortir aussi toutes les bêtes qui sont avec toi, qu’ils se répandent sur la terre et qu’ils s’y multiplient. »  (…) Noé bâtit un autel pour remercier Dieu et lui offrit un sacrifice.Le Seigneur respira l’odeur agréable  et dit en son cœur : « je renonce désormais à détruire tout ce qui vit comme je viens de le faire. Tant que la terre durera, semailles et moissons, chaleur et froidure, été et hiver, jour et nuit ne cesseront jamais ». (..) Il  ajouta : «j’établirai une alliance entre moi, vous et tout être vivant, pour toutes les générations à venir. Voici le signe : je place mon arc dans les nuages; il rappellera l’engagement que j’ai pris à l’égard de la terre. »”