Regrets éternels

Souvent, sur les tombes de nos cimetières, sont posées des plaques « Regrets éternels », comme hommage des vivants à leurs morts. Je me demande si notre génération de baby-boomers, qui s’apprête à quitter la scène, ne ressent pas des regrets éternels vis-à-vis des générations qui la suivent, et si nous ne devrions pas, alors, leur dédicacer une plaque « regrets éternels » des presque morts aux bien vivants.

Regrets éternels de n’avoir pas fait ce que nous aurions dû faire, alors que notre génération a été bénie des dieux (de Dieu !). « On avait le pain et le couteau », comme disaient nos grands-mères, et nous avons gâché tant de choses.

On a gâché notre intelligence en donnant une place trop importante au matériel, sans nous rendre compte que le nombre peut être l’ennemi de la qualité, alors que nous aurions dû nous concentrer sur les âmes, en nous préoccupant davantage d’éducation, de formation et de culture, qui semblent coûter cher alors qu’elles sont les seuls investissements rentables pour édifier.

On a gâché notre intelligence en laissant des systèmes de pensée guidés par la seule technique régir nos vies, sans garde-fous. Que n’avons-nous été capables de maîtriser, par exemple, ces réseaux sociaux qui font des ravages chez nos jeunes ?

On a gâché notre intelligence en installant un système de décision politique impuissant et populiste. Ah… cette erreur funeste du quinquennat !

On a gâché notre intelligence par manque d’attention aux défis de l’intégration et du vivre ensemble, et à cette terrible et dévastatrice question du genre.

Nous ne sommes pas encore morts et nous nous devons, plus que de nourrir des regrets éternels, de nous essayer à la prise de conscience et à l’action en ressuscitant les barricades auxquelles nous pensons encore.

 

Alain Penchinat, Eglise Protestante Unie de Nîmes
Paru dans l’Oeil de Réforme du 3 juillet 2025