Dans les psaumes, on côtoie les extrêmes : joie, tristesse, colère, espérance, peur, émerveillement, foi et doute, désespoir et supplication, bref, on est dans la démesure car ils expriment ce qu’il y a de plus beau et ce qu’il y a de ‘ »plus pire » , à l’image de ce dont l’être humain est capable.
Ainsi, certains psaumes nous choquent par la violence de leurs propos, révélant la colère et le désarroi de ceux qui les prononcent face à l’injustice qu’ils subissent. En même temps, mieux vaut déverser sa colère avec des points virgule qu’avec le poing levé !
Et Dieu là-dedans ?
Il faut parfois lire entre les lignes pour entendre, non seulement la voix du psalmiste, mais celle du Seigneur qui, par des détours dont lui seul a le secret, se fraye un passage à travers l’obscurité de l’humanité dont les pages de la Bible sont les témoins.
L’ensemble des psaumes ont été écrits pour être chantés. Certains ont accompagné les pèlerins de l’époque biblique après leur séjour à Jérusalem à l’occasion des fêtes religieuses. Sur le chemin du retour, on se donnait du courage en chantant, on demandait protection à Dieu pendant le voyage, car les routes étaient parfois dangereuses. Il n’était pas rare de tomber sur des animaux sauvages ou de se faire agresser en chemin par des bandits.
Cet après midi, nous avons voyagé nous aussi, « pèlerins du caté », nous sommes même allés jusqu’à l’autre bout du monde : l’Indonésie, en compagnie de la pluie et du psaume 4. Ce chant déverse une cascade d’émotions : plainte, supplication, accusation, confiance, espérance, interpellation, reconnaissance.
Qu’est -il arrivé exactement à celui qui parle, crie, et supplie le Seigneur ? On ne connait pas son histoire personnelle mais a t-on besoin de le savoir pour comprendre ce qu’il nous dit, pour entendre sa détresse ? Ses mots disent en tous cas le stress, le harcèlement et le poids des accusations mensongères dont il se déclare victime.
Menacé par des gens malintentionnés, notre Psalmiste aurait pu répondre par la violence à son tour, ou alors se réfugier chez lui et s’enfermer à double tour. Mais a t-il seulement un « chez lui » ? A t-il une maison qui le protège, des amis qui le comprennent, des voisins qui l’accueillent ? Ou bien est-il en situation de faiblesse, obligé de fuir comme ces mères indonésiennes à Bandung dont nous avons parlé avec les enfants cet après -midi ? Ou comme tant de personnes aujourd’hui à travers le monde : Afghans, Ukrainiens, Yéménites, Nigérians, Ouïgours, et bien d’autres encore ?
En tous cas, il est bien tourmenté. Avec les pressions qu’il subit de tous côtés, peut-il seulement trouver le sommeil ? On l’imagine plutôt en proie à des nuits blanches ou à des insomnies.
Au fait, ces mots-là, nous les connaissons, nous aussi. En effet, il nous arrive d’être pris d’une angoisse, d’une peur qui s’infiltre en nous, nous ronge et nous rend fébriles : les soucis, le regard des autres, la tyrannie de l’apparence, l’influence des réseaux sociaux, la pression des résultats, les embrouilles, la peur d’un avenir incertain etc ! Nous sommes alors dans une sorte de spirale qui occupe toute la place et avons bien des difficultés à dénicher Dieu dans les creux de notre vie.
Mais notre Psalmiste nous montre une autre direction : au lieu de baisser les bras, il ne s’apitoie pas sur son sort. Au contraire, quelque chose d’étonnant se produit : en un temps record, il passe de la détresse à la confiance, du stress à la sérénité, de l’insomnie au sommeil retrouvé …Et il terminera ainsi : »en paix je me couche, et aussitôt je dors, car toi seul Seigneur, tu me fais vivre en sécurité ».
Comment a t-il fait ? A -t -il trouvé un remède miracle, une potion magique, avalé un somnifère ? On ne le sait pas. Mais il s’est passé quelque chose, invisible pour nos yeux mais réel et profond pour lui : il a pris conscience qu’il n’était pas seul ni abandonné, qu’il peut parler à Dieu comme à un ami, qu’il peut déposer son fardeau, sa peur et son mal-être tout en se sachant écouté et accueilli tel qu’il est.
Entre appels et protestations, trois aveux se glissent dans sa prière qui viennent témoigner de sa certitude d’être entendu. Ils sont discrets mais ils sont bien là, comme des fils de couleur qui traversent la surface d’un tissu :
Premier fil : »Quand j’étais écrasé, tu m’as remis debout ». Le second : »Le Seigneur m’écoute quand je l’appelle au secours ». Et tout à la fin : »toi seul Seigneur, tu me fais vivre en sécurité ».
Cette prise de conscience n’efface pas ses problèmes comme d’un coup de baguette magique ! Ses ennemis n’ont pas changé, ils sont toujours là mais c’est lui qui a changé : il se sent armé, fortifié par la présence de Dieu qui vient le réchauffer pour affronter ce qui l’attend. Et quand bien même il n’aurait plus de « chez lui », sa prière prend le relais, devient son abri, la maison où il peut s’approvisionner à ce carburant si précieux qu’on appelle : la confiance. Cette confiance trouvée (ou retrouvée) va changer le regard qu’il porte sur ses adversaires : au lieu de les haïr, il va s‘adresser à eux, et plus encore : il va leur indiquer la voie à suivre, celle de la sagesse et de la paix dont je retiens le message suivant : il y a trop de bruit dans votre vie, trop de paroles inutiles.Cessez de vous agiter, cherchez le silence que la nuit vous donne, et parlez dans votre cœur. Ecoutez au -dedans de vous. La joie de vivre en compagnie de Dieu est supérieure à celle d’un portefeuille plein à craquer. Et puis, pourquoi courir après le bonheur comme s’il était à l’autre bout du monde alors qu’il est tout près de vous ?
Sa confiance en Dieu devient sa demeure, son fort intérieur que personne ne peut piétiner, et où il pourra s’endormir apaisé, sous le regard d’un Dieu qui ne dort jamais parce qu’il veille.
De même, à l’autre bout du monde, dans la ville de Bandung, sur l’île de Java, une maison du nom de Pasundan a été bâtie par des chrétiens pour témoigner de ce Dieu d’amour qui veille sur les plus démuni-es et ne dort jamais.
Soutenue par plusieurs Eglises, cette maison met en sécurité – avec leurs enfanrs- des femmes battues, réduites à vivre en esclaves, sans droits et sans papiers.
Cela me rappelle une parabole de Jésus qui compare celui qui écoute la parole de Dieu et la met en pratique à un homme sage qui a bâti sa maison sur le roc (Matthieu 7, 21-27). Malgré les pluies et les tempêtes, sa maison n’est pas écroulée. Au contraire, celui qui écoute la Parole mais ne la traduit pas en actes ressemble à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable. Pluies et tempêtes sont arrivées et la maison s’est écroulée. Cette parabole rappelle que la prière, l’écoute de Dieu n’est jamais séparée de l’action.
Fruit d’une solidarité inter-églises, la maison Pasundan a été construite dans l’esprit du bâtisseur sur le roc, soucieuse de mettre en pratique sa foi en Jésus-Christ.
Les besoins de maisons de ce genre sont immenses à travers le monde. Nous avons d’ailleurs appris qu’une autre maison-refuge pour accueillir les femmes en danger était en projet, cette fois en Malaisie.
Combien de maisons faudrait-il bâtir dans notre monde ? Un nombre incalculable ! En effet, les injustices, les guerres et les malheurs sont innombrables et ne cessent d’éclater, celle de l’Ukraine venant nous redire brutalement que rien n’est jamais acquis.
Il ne faudra pourtant jamais cesser de le dire : le désir de vivre, la soif de justice, l’amour de la vie et la recherche d’un bonheur à partager avec tous sont tout aussi grands. Ce désir porte un nom : ESPERANCE. Espérer envers et contre tout.
Me revient à l’esprit cette parole entendue un jour : »Si tu veux croire en Jésus -Christ et bâtir sa vie sur lui, commence donc par aimer ». Ainsi, il habitera en toi, et toi en lui. Tu seras sa maison et lui ton abri. Il sera ton chant , tu seras sa prière.
Amen
Titia Es-Sbanti
Prédication -culte de l’Eglise universelle à Nîmes
12 mars 2022, Mas des abeilles
Jeux de l’après-midi caté avec les enfants : jouer, découvrir, comprendre
Un des animaux emblématiques de l’Indonésie est l’orang-outang, ce qui, en indonésien signifie « l’homme de la forêt ». La sagesse aura t-elle raisons de la folie humaine ? En tous cas, elle n’est pas toujours là où l’on croit..
La fin du culte fut un appel :
-à ne pas fermer les yeux sur les injustices,
-à ne pas nous boucher les oreilles face aux appels au secours
-à ne pas nous taire lorsque la dignité humaine est piétinée