Je ne sais pas si vous le pensez comme moi, mais il me semble que chaque fois que nous vivons une période de crise profonde, elle s’avère propice à la mise à jour de traits de nos personnalités, très divers, qui font la richesse de notre humanité. Les différentes mesures prises pour essayer de contrôler puis de maîtriser cette pandémie sont autant d’occasions de les faire apparaître. À bien y regarder, nous pouvons tous, à un moment ou à un autre, nous retrouver dans l’un ou l’autre des types de comportements qui vont suivre.
Il y a les « compétents », ceux qui « savent » que l’on n’aurait jamais dû confiner, ou bien que l’on a confiné trop tôt, trop tard, trop durement, trop mollement, trop longuement, trop brièvement etc. qui ont tous au moins un point en commun : « tout cela a tellement été géré en dépit du bon sens » que c’en est, comme aurait dit feu Georges Marchais, « un véritable scandale » en appuyant bien fortement sur l’« an » et le « al » et en supprimant le « e » terminal.
Il y a les inquiets, ceux qui depuis plusieurs mois ne sortent plus de chez eux, ou si peu, qui osent à peine prendre leur téléphone tant ils craignent que par une sorte de malignité cachée, le virus puisse les atteindre par cette voie.
Les fatalistes, ceux qui pensent que « de toutes façons, il faut bien mourir de quelque chose » alors à quoi bon tous ces efforts ! et vivent sans respecter les comportements que nous impose la situation sanitaire. Certains d’entre eux érigent même en acte de résistance ce qui est finalement une attitude méprisante pour la santé d’autrui.
Les suspicieux, ceux à qui « ON ne la fait pas », et pensent qu’ « ON » ne nous dit pas tout, qu’ « ON » nous cache l’essentiel, qu’ « ON » nous manipule et que des forces occultes tirent véritablement les ficelles. La preuve en est que… suivi d’un galimatias d’arguments où le vrai et le faux se mêlent en une gerbe inextricable qui fait les délices des théoriciens du complot.
Les facétieux (un peu gourmands !), ceux qui disent qu’en ces temps troublés où l’on n’est sûr de rien, « seul le confit ne ment » et essaient de traverser cette période avec cette dose d’humour et de dérision sur eux-mêmes que sont souvent capables d’avoir les peuples désespérés, se sentant pris dans une nasse dont ils ne sortiront pas.
Vous l’aurez compris, toutes ces postures et il en existe bien d’autres, ne sont que le reflet des manières dont les uns et les autres, nous essayons de répondre à l’angoisse qui nous étreint parfois ; elles sont autant de tentatives de réponses au sentiment d’absurdité du temps présent qui nous inhibe ou nous révolte.
Ayant vainement cherché une raison au sens de la vie, Albert Camus concluait que le monde est absurde et que la seule réponse pour lui à cette absurdité se trouvait non pas dans le suicide comme cela parait être logique, mais la révolte. Nous pourrions en rester là et essayer, chacun à sa manière, de survivre à cette désillusion profonde sur le sens de la vie.
Mais voilà, pour nous Chrétiens, un homme est venu il y a 2000 ans, que l’on a appelé Fils du Très Haut. Il nous a bien démontré par sa vie, ses paroles et ses actes que non, ce monde n’est pas absurde, que oui, la vie a un sens toujours à chercher et à découvrir, et qui un jour nous sera révélé. Dans l’attente de cette révélation, son message nous permet de comprendre que seul l’amour est une réponse pertinente à l’absurdité apparente du monde. Cela est notre espérance, mais c’est aussi notre croix, car quoi de plus difficile que de vouloir vivre en adéquation avec cet impératif lorsqu’on connaît le poids de notre égocentrisme et de nos égoïsmes ?
« Je vous donne un commandement nouveau : que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés, que vous aussi vous vous aimiez les uns les autres. Si vous avez de l’amour les uns pour les autres, tous sauront que vous êtes mes disciples » (Jean 13, 34-35)
Que cela semble simple, mais que c’est cependant difficile à mettre en pratique ! Pourtant, ne nous laissons pas décourager par l’importance de la tâche, souvenons-nous en effet de cette promesse faite jadis au peuple hébreu :
« Ce commandement que j’institue pour toi aujourd’hui n’est pas au-dessus de tes forces ni hors de ta portée. Il n’est pas dans le ciel, pour que tu dises : « Qui montera pour nous au ciel afin de nous l’apporter et de nous le faire entendre, pour que nous le mettions en pratique ? « Il n’est pas de l’autre côté de la mer pour que tu dises : « Qui passera pour nous de l’autre côté de la mer afin de nous l’apporter et de nous le faire entendre, pour que nous le mettions en pratique ? » Cette parole au contraire, est tout près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique« . (Deutéronome 30, 11-14)
Voilà une des belles leçons que nous pourrions tirer de cette expérience extraordinaire que nous vivons et également sans doute l’essentiel du message d’espérance que nous avons à diffuser autour de nous afin que chacun puisse continuer à avancer avec ardeur et le cœur rempli d’espérance.
Bernard Cavalier.