Mamré…. C’est là où la Bible raconte qu’Abraham s’est installé. Vous vous souvenez ? Abraham habitait à Ur, une ville en Chaldée (Irak aujourd’hui), puis un jour, nous raconte la Bible, Dieu lui dit : «Va, pars ! » …« Abraham, Dieu t’appelle, Abraham il faut partir. Il faut prendre la route pour avancer dans la foi. .. » Voilà ce que dit le cantique changé avec les enfants.
Abraham part et devient ‘nomade’, il vit donc sous la tente, avec sa famille, ses troupeaux, ses serviteurs. Et à un moment, il s’installe à Mamré, en Palestine. Le paysage est aride là-bas, d’un côté quelques vignes, quelques petites forêts (un peu comme la garrigue ici, j’imagine ?), et de l’autre côté la steppe où presque rien ne pousse. Dans la journée, il fait très chaud, et la nuit il fait très froid. Et quand le soleil tape en journée, les gens se mettent à l’ombre, font la sieste un peu, attendent que la chaleur passe.
Après coup
Imaginez un peu : si Abraham était resté assis à l’entrée de la tente, sans bouger, quand les voyageurs passent ? Et s’il n’avait pas couru vers eux ? Et si les voyageurs n’avaient pas eu de temps de s’arrêter, pressés qu’ils devaient être pour voyager ainsi en pleine chaleur ? Et si Sarah n’avait pas ri quand elle entend cette promesse si décalée : avoir un enfant ? Elle, la vieille ? Si, si, si …. L’histoire aurait pris une autre tournure. Abraham n’aurait pas accueilli ces voyageurs. Abraham et Sarah n’auraient pas appelé leur fils ‘ISAAK’ (en hébreu : il rit) . Il n’y aurait pas eu cette rencontre entre Abraham et Sarah et ces voyageurs : ça aurait été assez dommage… Parce qu’après coup ils se rendent compte que ces voyageurs étaient des envoyés de Dieu, des anges, des messagers ou peut-être Dieu lui-même ? Mais voilà, il y a eu cette rencontre, une rencontre qui change la vie. Effectivement, il y a des rencontres qui changent la vie, dans chaque vie. La plupart du temps on s’en rend compte après coup : « ah oui, en y repensant, telle rencontre a orienté ma vie dans telle ou telle direction, elle a été un repère, une balise sur ma route…
Dieu a de multiples manières de nous rencontrer, de se glisser sur notre chemin de vie…. Et là aussi, c’est souvent après coup qu’on en prend conscience, comme dans le rétroviseur…
Mais Abraham n’a pas accueilli ces voyageurs dans l’idée de recevoir des envoyés de Dieu, voire Dieu lui-même. Non, Abraham pratique tout d’abord l’hospitalité.
Dieu naît dans la rencontre
L’hospitalité dans les régions de désert ou de steppe est nécessaire pour survivre… Abraham (avec Sarah) utilise des gestes très concrets pour pratiquer l’accueil et l’hospitalité : Abraham s’empresse de recevoir ses voyageurs. Il les salue avec politesse, il leur montre son respect. Il propose de leur laver les pieds, de se reposer à l’ombre de l’arbre, de manger et reprendre des forces. Il les laisse aller plus loin, il ne les retient pas pour lui. Sarah prend sa meilleure farine, le serviteur se dépêche pour préparer le veau tendre et bon. Abraham se tient debout devant eux : c’est l’attitude du serviteur.
Et nous, comment pratiquons-nous l’hospitalité ? Aujourd’hui, ici à Nîmes, nous ne sommes pas dans le même contexte. On ne vit pas sous la tente, on ne voit pas forcément les gens passer….Et pourtant, les ‘ingrédients’ de l’hospitalité sont toujours un peu les mêmes : un espace, un peu de temps pour partager, un repas, la possibilité de reprendre des forces… et puis, laisser repartir l’autre. Ne pas « lui mettre le grappin dessus ».
C’est tout un art d’accueillir ainsi, en respect, en gardant la bonne distance….C’est ainsi que Dieu naît dans la rencontre : L’accueil d’Abraham et Sarah, leur générosité, leur envie de faire du bien aux autres, tout cela permet peu à peu à Dieu de naître dans ce récit. Accueillir quelqu’un ainsi, c’est lui dire ‘Il est bon que tu sois là’.
Aujourd’hui aussi, ici à la Frat, on se retrouve aussi dans un espace où l’on s’accueille les uns les autres. On se dit les uns aux autres : il est bon que tu sois là. Il est bon de partager ce moment ensemble, un peu d’espace, un peu de temps, un repas, et puis prendre des forces.
« Accueillir un enfant en mon nom »
C’est ce que propose aussi la communauté des sœurs de Mamré, inspirée par l’hospitalité d’Abraham et Sarah sous les chênes de Mamré. D’où le nom. Tous les jours elles accueillent une centaine d’enfants pour un repas. Souvent, le seul vrai repas dans la journée. Difficile à imaginer pour nous ici….Ce n’est pas pour rien qu’on dit à Madagascar : ‘Ventre plein de riz, tout le monde sourit’. Elles le font parce qu’il y a beaucoup de pauvreté à Madagascar ; c’est un des pays les plus pauvres du monde. Elles le font, parce que Jésus a dit : ‘Celui qui accueille un enfant en mon nom, c’est moi-même qu’il accueille’.
Ainsi on pourrait dire que le Seigneur se met à table tous les jours avec les enfants. On ne le voit pas, mais il est là, présent. On ne peut pas ‘fixer’ sa présence, on ne le voit pas directement, mais il est présent là où l’un va vers l’autre. C’est pour cela qu’aller vers l’autre et l’accueillir est toujours porteur d’une promesse : celle d’une présence de Dieu.
Iris REUTER
Extraits de la prédication du 16 mars 2019 au culte final de la Fraternité de Nîmes, à l ’occasion de la journée catéchétique consacrée à l’Eglise universelle. Une quarantaine d’enfants et catéchumènes de l’Eglise protestante Unie de Nîmes ont participé dans les locaux et le jardin de la Frat’.
Objectif : découvrir l’action solidaire d’une communauté de sœurs protestantes engagées à Madagascar : les Sœurs de Mamré. Leur outil : une maison d’accueil à Antananarivo, la capitale, et une ferme à la campagne, à l’Est de Tana.