Qui est le plus grand ?

Un jour, en traversant la Galilée, Jésus explique à ses disciples que s’ils veulent le suivre jusqu’au bout, ce ne sera pas facile et qu’il vaut mieux qu’ils le sachent. En effet, ce Maitre qu’ils ont décidé de suivre  ne leur promet pas de belles excursions sous le soleil de Palestine, ni un stage de développement personnel. Au contraire, se sachant détesté par certains chefs politiques et religieux au pouvoir, Jésus avertit plusieurs fois ses disciples qu’il va connaître de grandes épreuves et qu’il faudra que ses disciples continuent d’avancer avec pour seul carburant  la confiance et le courage.

Voici, dans l’Evangile de Marc au chapitre 10, les versets 35-45 :
Ce jour-là, Jésus et ses disciples étaient en route vers Jérusalem, et Jésus marchait devant eux. Les disciples étaient troublés, et ceux qui les suivaient avaient peur. Jésus prit à part les Douze, et  leur annonça ce qui allait lui arriver : »Nous montons à Jérusalem. Le Fils de l’homme sera livré aux grands prêtres et aux scribes. Ils le condamneront à mort, le livreront aux Romains,se moqueront de lui, lui cracheront dessus,le fouetteront et le tueront. Et trois jours après, il se relèvera ».
C’est alors que deux d’entre eux, Jacques et Jean, fils de Zébédée, s’approchèrent de Jésus et lui dirent :  »Maître, nous voudrions que tu fasses pour nous ce que nous te demanderons ».
Jésus leur dit : Que voulez-vous que je fasse pour vous ? Permets-nous, lui dirent-ils, de nous asseoir l’un à ta droite et l’autre à ta gauche dans ta gloire. Jésus leur dit : « Vous ne savez pas ce que vous demandez ! Êtes-vous capables de boire la coupe de douleur que je vais boire,ou de recevoir le baptême dans lequel je vais être plongé ? »Ils lui répondirent : « Nous en sommes capables. » Jésus leur dit : « Vous boirez en effet la coupe que je vais boire et vous serez baptisés du baptême où je vais être plongé. Mais ce n’est pas à moi de décider qui siègera à ma droite ou à ma gauche; ces places sont à ceux pour qui Dieu les a préparées.»
Quand les dix autres disciples entendirent cela, ils s’indignèrent contre Jacques et Jean.
Alors Jésus les appela tous et leur dit :  »Vous le savez, ceux qui passent pour les chefs dominent les autres,et les personnes puissantes leur font sentir leur pouvoir . Mais cela ne doit pas se passer ainsi parmi vous.Celui qui veut devenir grand parmi vous sera votre serviteur et celui qui veut être le premier parmi vous sera l’esclave de tous. Le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir ».

Les disciples sont vraiment à côté de la plaque. Jésus se confie à eux (et ce n’est pas la première fois),  il leur annonce les choses terribles qu’il va devoir affronter : la condamnation à mort,  l’humiliation, puis la crucifixion. Et voilà que deux d’entre eux, Jacques et Jean, ne trouvent rien de mieux à répondre que de lui demander de leur réserver une place d’honneur lorsqu’il  règnera en Roi sur la terre entière !
En effet, on s’attendait à ce qu’ils soient bouleversés, qu’ils expriment  leur solidarité, leur amitié, qu’ils soient  tristes pour leur Maître, qu’ils le serrent dans leurs bras, qu’ils le réconfortent ! Parce que c’est ce qu’on est en droit d’attendre de ses amis.. Et bien non ! Ils font la sourde oreille, la seule chose qui les préoccupe, c’est eux -mêmes. Ecoutez bien :  »Nous voudrions que tu fasses pour nous ce que nous allons te demander’.
Ça me rappelle l’époque où mes enfants étaient petits et qu’ils commençaient leurs demandes par :  »maman, je voudrais te demander quelque chose mais  je sais que tu vas pas vouloir (ou : jure moi que tu me diras oui).
Chers parents, je vois que ça vous parle ! Vos enfants savent à l’avance que vous ne serez pas d’accord : mais ils savent aussi y mettre les formes quand ils désirent
vraiment quelque chose. Et généralement, plus ils doutent d’obtenir satisfaction, plus ils prennent des précautions et…moins ça marche !
Du coup, j’imagine les deux disciples, Jacques et Jean, en train de se pousser du coude l’un et l’autre :  »vas-y, demande lui, non, vas-y toi , allez !
Mais peut-être qu’à la place de Jésus, j’aurais fini par leur dire : « Bon allez-y, dites-le » . Mais ce n’est pas ce qui se passe. Jésus les écoute : « que voulez-vous que je fasse pour vous ? » La réponse, on l’a entendue : « réserve-nous une bonne place à tes côtés ».
Donne nous un peu de ta gloire, disent -ils. En hébreu, cela veut dire : « du poids », de la considération. Autrement dit : Donne-nous un peu d’importance, de reconnaissance. Et pour y parvenir, Jacques et Jean n’y vont pas par quatre chemins : Voilà ce que nous voulons que tu fasses pour nous, disent -ils à Jésus. Ce n’est pas une suggestion, c’est un ordre ! On dirait le Notre Père à l’envers :que notre règne vienne, que notre volonté soit faite sur la terre comme au ciel lorsque nous y serons ! Donne-nous chaque jour ce que nous désirons !
Euh…vous êtes sûrs que c’est le Notre Père ?

En attendant, Jésus leur répond  :  » Êtes-vous conscients de ce que vous demandez ?  Etes -vous capables de me suivre jusqu’au bout ?  » Les deux disciples n’ont pas froid aux yeux et répondent sans hésiter : oui oui, nous le pouvons !

C’est alors que Jésus change totalement de logique et retourne leur question comme une crêpe  : si le monde est plein de gens qui veulent commander pour dominer, cela ne doit pas se passer ainsi parmi vous. Que celui qui veut devenir grand parmi vous soit votre serviteur. Car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir. Derrière ces mots, c’est de lui-même que Jésus parle et cette annonce renverse totalement l’image que nous avons de lui.  En effet, nous  connaissons et nous l’appelons surtout  Seigneur et Sauveur, Rédempteur, Roi, Fils de Dieu, Prince de la paix, Majesté. Mais nous le considérons  bien moins souvent comme Celui qui sert, c’est-à-dire comme le Serviteur (diacre).
En fait, le sens du mot utilisé par Jésus est  « esclave ». Les disciples rêvaient d’être au sommet avec lui et voilà que Jésus leur dit qu’il est tout en bas !
Evitons cependant de trop nous offenser de l’attitude de Jacques et Jean, car au fond, est-ce que cela ne nous arrive pas à nous aussi ? En effet, hier comme aujourd’hui, nous avons cette même soif de reconnaissance, nous ne pouvons pas nous empêcher de nous comparer aux autres. Nous avons toujours besoin de savoir ce que nous valons, et si nous valons mieux que notre voisin. Nous avons besoin d’être reconnus, d’exister aux yeux des autres ,voire ..de briller. Le culte de la performance, l’école, le travail, la publicité, la concurrence effrénée dans tous les domaines :  tout, aujourd’hui, nous appelle à vouloir être meilleur et plus grand que les autres.

A l’opposé de cela, le Christ s’abaisse lui-même pour nous  inviter à baisser nous aussi notre regard. C’est ainsi que nous pourrons prêter attention aux derniers, aux plus petits, à ceux que la société considère comme les moins importants. Il nous appelle non pas à briller mais à éclairer. Le plus grand parmi vous c’est celui qui a le moins de valeur à vos yeux, dit le Christ.

D’ailleurs, pour être sûr que ses disciples comprennent, Jésus va faire un geste totalement surprenant au cours de son dernier repas avec eux. Savez -vous ce qu’il va faire ? Il va enfiler un tablier, prendre une bassine d’eau et laver les pieds de ses disciples. Y compris de Pierre qui le reniera et de Judas qui le trahira. C’est sur ce chemin -là qu’il nous invite à le suivre :

Amen

Titia Es-Sbanti.

 


Prédication du 11/02/2023, culte intergénérationnel
temple du Mas des abeilles.

Retrouvez la séance de caté correspondante :

https://nimes-eglise-protestante-unie.fr/servir-ou-se-servir