PAROLE DU JOUR-31

Une parole anonyme ?

Un jour, un de mes collègues, un catholique avec qui j’aimais échanger, m’a cité une courte phrase qui m’a frappée, et dont l’auteur était un saint. Ce saint, il l’a nommé, mais j’ai oublié son nom. Lorsque j’ai revu mon collègue, bien des années plus tard, je lui ai demandé ce nom : il ne voyait pas du tout qui cela pouvait être, il avait même oublié notre conversation. La phrase est donc devenue une phrase anonyme. Je me suis dit : peu importe, c’est aussi ainsi, par des circuits cachés, que Dieu me parle. Dans la Bible, il y a des « anges », c’est-à-dire des messagers. Nous sommes souvent, à notre insu, des anges les uns pour les autres. Et notre nom n’a pas d’importance.

Alors, cette phrase, qu’est-ce qu’elle dit ? La voici :
« Dieu mène très loin celui qui fait ce qu’il peut. »

Sur le moment, elle a été pour moi consolatrice, libératrice, lumineuse. Elle continue à l’être, c’est pourquoi je vous la livre.

Faire « ce que je peux », ce n’est pas un engagement au rabais. Ce n’est pas renoncer à l’exigence de l’Évangile, mais c’est la mettre dans mon quotidien, dans mon humanité. Faire « ce que je peux », en fait, c’est déjà beaucoup ; et je le sens. Pensons par exemple à la joie de donner, sous toutes les formes que peut prendre le don (temps, travail, présence, argent…).
Elle convient bien aussi, cette phrase, à notre situation de confinement : quand on est enfermé, on se sent bien peu utile, surtout quand on se compare à celles et ceux qui se donnent à fond, à l’hôpital ou ailleurs. En même temps, chaque jour nous montre que quand on met bout à bout tous les « ce que je peux », cela finit par faire beaucoup. Et le savoir nous fait du bien.

Mais quel lien avec Dieu ? Après tout, on pourrait s’arrêter là et beaucoup de non croyants agissent comme nous. Dire qu’à travers ces actions modestes, Dieu me mène loin, très loin, c’est simplement reconnaître sa présence et sa grâce, dès le début. Car, je le crois, Dieu n’est pas là-bas, au bout du chemin, au terme de mes efforts, mais ici, et dès l’origine.
Sa grâce m’accompagne jour après jour dans les petites choses. Et si elle a pu se révéler avec plus de force à certains moments de ma vie, j’en reste, au quotidien, au « ce que je peux ». Plus ou moins, selon les moments.

Anonymes ou non, les paroles transmises font vivre. Continuons la chaîne !

Sylvie Franchet d’Espèrey, le 24 avril 2020