Le trousseau de clés

Quel rapport entre des clés et des abeilles ? entre des Corinthiens et une ruche, un  apôtre et un apiculteur ?  C’est ce que le samedi KT du 5 février a permis de faire découvrir aux enfants,sous un soleil radieux. Un trousseau comporte de nombreuses clés qui ont chacune leur importance.

Il en est de même pour la communauté chrétienne, nous explique Paul. Elle symbolise le « corps du Christ », composé de diverses parties qui ont toute leur place et leur fonction. Mais à Corinthe, en Grèce, où l’apôtre fonde une des premières Eglises, la précieuse unité des membres du corps ne parvient pas à vivre ensemble dans un amour fraternel.

C’est troublant, n’est-ce pas, de se dire que les toutes premières communautés chrétiennes étaient déjà divisées ! C’est ce que Paul écrit dans sa 1ère lettre aux Corinthiens. Très affligé par la situation,  il invente une petite histoire digne d’une parabole ( 1 Co 12, 12-27).  « Vous êtes le corps du Christ, leur dit- il. (…) Il y a plusieurs parties mais UN seul corps. L’œil ne peut pas dire à la main : « Je n’ai pas besoin de toi ! » Et la tête ne peut pas dire aux pieds : « Je n’ai pas besoin de vous ! » .. Et pourtant, il sera le témoin de  vives tensions et de jugements, à l’opposé de l’amour fraternel selon le Christ .

De cette situation, Paul se souviendra longtemps après. Et ses lecteurs aussi. Tiens, l’autre nuit,  j’ai fait un rêve : certains membres de mon corps s’étaient mis à parler entre eux. Sacré bazar, entre nous soit dit !  Je vous le raconte (1)   :

Le pied a dit : Comme j’aimerais être une main ! J’aurais cinq jolis doigts, longs et agiles pour attraper, caresser, tricoter ou peindre, pour écrire des choses importantes, pour être poète… Mais je ne suis qu’un pied, raide et maladroit, alors.. je préfère m’en aller !

L’oreille a dit : Comme j’aimerais être un œil ! Brillant, pétillant, en couleur.. Je serais très important : je verrais tout avant tout le monde ! Mais ..je ne suis qu’une simple oreille sans iris ni pupille, ça me désespère… En plus, je suis moche, je ressemble à un cratère. Je préfère m’en aller ….

Le nez a dit : Ah, si seulement j’étais une bouche : je dirais des choses extraordinaires et toutes les oreilles m’écouteraient  et me respecteraient ! Mais aujourd’hui, on nous regarde de haut, on nous méprise, nous, les Nez … Et ce fichu covid nous a ruinés : exploités, nous le sommes, mille fois par jour,  test sur test…on n’en peut plus ! On essaye de tenir bon, de rester positif, mais c’est encore pire, et tout le monde nous en veut.. !  Je préfère m’en aller…

L’oeil, lui, est en colère contre la main : Hé, toi, la Main, tu ne fais que des catastrophes, tu es maladroite, c’est toujours toi qui casses tout, j’en ai assez. Va-t-en !
La main  lui répond :  Si tu regardais un peu ce que je fais, je ferais peut-être moins de bêtises ! Et elle s’en va. 

Vexé, l’oeil se dirige vers le pupitre et tombe sur la grosse bible ouverte.

L’oeil  : Oh la la, ce qu’elle m’énerve, cette main ! Je lirais bien une histoire pour me calmer…Tiens tiens, voilà qui est  intéressant, j’aimerais bien connaître la fin…Ah zut, elle est racontée au dos de la page…Comment faire ?

La main : Tu vois, Oeil, sans moi, tu es condamné à recommencer éternellement la même histoire. Dans la vie, c’est important de pouvoir tourner la page tu sais, et moi, si tu me faisais confiance, je pourrais t’aider !
Arrive le cerveau avec son petit air supérieur :  Vous ne comprenez rien, pauvres idiots . Vous ne savez qu’obéir à mes ordres. Sans moi, vous êtes des incapables.  Tenez, essayez donc de bouger sans que je vous en donne l’ordre.

Tout le monde essaye de bouger mais reste sur place, immobile.

Le cerveau , triomphant : Ah, vous voyez, je suis in-dis-pen-sa-ble !  C’est moi le chef. Partez maintenant, je vous donne l’autorisation !
Tous  retournent à leur place : oreille, nez, œil, main , pied  (sauf le cerveau ) .

« Bien, s’exclame le cerveau : passons aux choses sérieuses. Ce qui compte c’est de bien réfléchir, et celui qui réfléchis bien, c’est moi. C’est moi qui conçois, imagine, organise et pilote… C’est alors que du fond de la salle jaillit une voix qui dit : C’est pas fini, ce blabla ?  On aimerait bien te voir AGIR un peu plus, Cerveau , au lieu de passer ton temps à crâner !   Vexé comme un pou, le cerveau a rétorqué : Ah, on me cherche ? Eh bien vous allez voir à qui vous avez à faire !

Il lève le bras comme pour passer à l’attaque et crie :  « En avant !  Mais il ne bouge pas d’un pouce. Il essaye de décoller ses pieds du sol. Rien à faire. 

La situation était devenue pathétique . C’est alors que débarque, à la fin de mon rêve, Paul, tout essoufflé  :« Hé ! C’est pas un peu fini tout ça ? Vous êtes ridicules ! 

Sa colère me réveilla, et  les mots de son hymne à l’amour  (1 Co 13) se mirent à danser devant mes yeux :  « c’est vous qui êtes le corps du Christ (…. ) vous aurez beau être les plus savants, les plus intelligents, ..mais si vous n’avez pas d’amour, vous n’êtes rien « ..
C’est donc ça : nous
sommes connectés au Christ par l’amour que  nous avons les uns pour les autres.

 

C’est ensemble que nous sommes le Corps du Christ. Certes, ce n’est pas facile :  il y a des personnes qu’on a du mal à aimer. Il y en a qui nous blessent par leurs paroles, d’autres qui nous choquent par leur comportement.

 Il y en a qu’on n’ a pas envie de croiser sur notre chemin !  Mais l’apôtre Paul nous explique qu’ on choisit ses amis mais qu’on ne choisit pas ses frères et sœurs (en Christ) .
Dans sa parabole du corps, il nous rend attentif à ceux qui sont fragiles, à ceux qui ne payent pas de mine, à ceux que l’on regarde de travers, ou à ceux que personne ne regarde..

 

Après Paul, un invité-surprise fit son entrée :  l’apiculteur amateur, Jean -Noël Cabanis. Avec lui, une autre histoire est venue compléter le tableau : la parabole des abeilles. Il nous a expliqué leur manière de vivre, de s’organiser, leur sens du Bien commun.

L’organisation des abeilles est fondée sur  la dépendance : pas de miel sans abeilles. Pas d’abeille sans nectar. Pas de nectar sans fleur. Pas de fleur sans pollen. Pas de pollen sans…. abeille pour l’extraire. Pas d’abeille sans Ruche. Pas de Ruche sans Reine ! Chaque partie dépend d’une autre. Cette dépendance n’est ni un problème, ni une faiblesse mais la condition du bonheur, c’est-à-dire de la bonne heure, du moment favorable pour la rencontre et le partage.
Si les abeilles font du miel, c’est pour se nourrir elles- mêmes. Ce qui ne les empêche pas de jouer un rôle majeur dans le cycle de reproduction des fleurs et des arbres fruitiers.  Ainsi, en allant chercher le nectar, de fleurs en fleurs. les abeilles pollinisent sans le savoir, elles font du bien sans intention de le donner.
Voilà une parabole pour nous aujourd’hui : nous voilà invités à butiner la Parole de Dieu là où elle s’offre à nous, avec ses pages à lire, ses pétales à ouvrir , son parfum à respirer, son nectar à partager.

Amen

 

Titia Es-Sbanti

 

Extraits de la prédication donnée au culte caté  inter-génération du samedi  5 février 2022, paroisse du Mas des abeilles

(1) adaptation d’un sketch de Marion Combes

 

 

Extraits de la 1ere Lettre aux Corinthiens, chap 12 :
(2) ..Vous êtes le corps du Christ… Le corps forme un TOUT, et pourtant il a plusieurs parties. (…)Si le pied disait : « Je ne suis pas une main, donc je n’appartiens pas au corps », il ne cesserait pas pour autant d’être une partie du corps. Et si l’oreille disait : « Je ne suis pas un œil, donc je n’appartiens pas au corps », elle ne cesserait pas pour autant d’être une partie du corps. Si tout le corps n’était qu’un œil, comment entendrait-il ? Et s’il n’était qu’une oreille, comment sentirait-il les odeurs ? En réalité, Dieu a disposé chacune des parties du corps comme il l’a voulu. (…) Il y a donc plusieurs parties mais UN seul corps. L’œil ne peut donc pas dire à la main : « Je n’ai pas besoin de toi ! » Et la tête ne peut pas dire aux pieds : « Je n’ai pas besoin de vous ! » Au contraire, même les parties du corps qui semblent les plus faibles sont nécessaires. Et les parties que nous jugeons les moins respectables, nous les respectons davantage. Ainsi, il n’y a pas de division dans le corps. Au contraire, toutes ses parties prennent soin les unes des autres. Si une partie du corps souffre, toutes les autres parties souffrent avec elle. Si une partie est à l’honneur, toutes les autres partagent sa joie…  »