Cette parabole de Jésus a inspiré une célèbre histoire …celle des trois petits cochons qui a bercé des millions d’enfants depuis trois siècles et qui s’est sans doute inspiré -consciemment ou non- de la parabole biblique.
Mais alors, me direz vous peut-être, n’avons-nous pas affaire ici, du même coup, à une simple histoire.. de bon sens, dans le genre : « mieux vaut prévenir que guérir » (ou mourir dans la gueule d’un loup) ?
En fait, cette parabole n’est pas aussi simple qu’elle n’en a l’air..
Tout d’abord, elle est souvent racontée de façon incomplète. Pourquoi ? Parce que nous faisons de cette parabole une photographie avec un zoom sur ces 2 maisons. De ce fait, nous laissons tomber le reste, à savoir : le contexte. C’est le propre de la photo : elle opère un choix en encadrant ce qui l’intéresse et par conséquent elle écarte ce qu’il y a tout autour. C’est ce qui se passe avec notre parabole. Avec ce ‘clic’ sur les 2 maisons, elle fait partie des textes préférés des couples se préparant au mariage, au temple ou à l’Eglise. Il faut dire que la parabole s’y prête tellement bien : les tourtereaux s’identifient tous à l’homme sage qui va bâtir sa maison sur le rocher ! Car tous, évidemment, veulent construire leur amour sur du solide et non sur du sable… Et bien-sûr, tous espèrent aussi que leur amour sera plus fort que les tempêtes à traverser dans la vie…Le souci, c’est qu’il manque un morceau à cette parabole !
Penchons -nous sur les versets précédents qui l’introduisent : Comme les disciples s’étaient rassemblés autour de Jésus, sur la montagne, il leur disait : «Il ne suffit pas de me dire : “Seigneur, Seigneur !” pour entrer dans le Royaume des cieux; mais il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux. Tout homme qui écoute ce que je vous dis là et le met en pratique est comparable à un homme avisé ..qui a bâti …. sur le roc…
Changement d’ambiance ! En général, en découvrant cette partie, les couples se bousculent moins au portillon, et on les comprend. Finies les images d’épinal de petite maison dans la prairie, d’édification du foyer conjugal pierre par pierre : on entre dans une autre dimension, celle de l’obéissance et de l’exigence, à savoir : faire la volonté de Dieu. Rien que ça ! Ecouter les paroles de Jésus et les mettre en œuvre, voilà qui est bien plus délicat. Il faut aller plus loin, réfléchir . Ce n’est pas de la maçonnerie ni de beaux plans d’architecture, il faut se creuser.. les méninges ! Etudier ce qu’il y a derrière les mots de la parabole. Quelle est donc cette maison appelée à être solide : notre vie ? notre foi ? l’obéissance à l’Evangile ?
Et puis, de quel côté sommes-nous : du côté du rocher ou du sable mouvant ?
Il ne suffit pas de me dire « Seigneur, Seigneur ».. Jésus est sévère à l’égard de ceux qui se contentent d’invoquer le nom de Dieu. Il laisse entendre clairement que ce qui compte, ce n’est pas seulement de prier ou de prononcer le nom de Dieu. Ce qui compte, ce n’est pas seulement de porter la croix huguenote ou la croix tout court, ce qui compte ce n’est pas seulement de chanter des cantiques le dimanche : il s’agit avant tout de faire la volonté de Dieu. Et pour savoir ce que Dieu veut, il faut d’abord se mettre…. à l’écoute. Un long enseignement de Jésus précède la parabole des deux maisons, qui s’étale sur deux chapitres (5 à 7) : ne jugez pas les autres…cherchez et vous trouverez…efforcez-vous d’entrer par la porte étroite…aimez vos ennemis…Bref, tout un programme. Ne faut-il pas une vie tout entière pour faire sienne ces exhortations et en tirer les conséquences concrètes pour sa vie ? En tous cas, ce qui est sûr, c’est que cela prend du temps.
Dans la parabole, l’homme dont la maison reste debout a compris cela parce que pour la bâtir sur le roc, il lui faudra du temps et de l’énergie : charrier des pierres, creuser dans le sol, user de patience et de persévérance.
A l’opposé, l’autre bâtisseur semble vouloir s’économiser : vite fait bien fait, il dresse sa maison …sur le sable. Comme il nous ressemble ! C’est un homme de notre temps, celui de la rapidité, de l’immédiateté. C’est un adepte de la Fast Foi, aimant surfer sur la vie spirituelle – oh ce n’est pas un mauvais bougre, il veut bien croire un peu, faire baptiser ses enfants pour faire plaisir à son conjoint, allumer un cierge de temps en temps s’il est catholique, aller à l’Assemblée du Désert s’il est protestant. Il veut bien se marier religieusement, il veut bien tout ça …du moment que l’Evangile ne bouleverse pas son planning, ses habitudes, ses projets personnels, autrement dit : sa vie quotidienne.
La question qui se pose à chacun de nous est la suivante : qu’est-ce que la Foi ? Un cadeau ou un fardeau ? Un ensemble de choses à faire ou une relation de confiance en Dieu ? Et si la foi est cette confiance profonde en Dieu, ce n’est pas pour protéger notre vie mais bel et bien pour la transformer !
Dans le monde incertain où nous vivons tous aujourd’hui, anxiogène et criblé de doutes : est ce que cela change quelque chose ou non d’être habité par la foi ?
Sur quoi notre vie est -elle bâtie ? Sur le roc ou sur le sable ? Finalement, n’avons- nous pas toujours les deux maisons en nous ? Après tout, c’est avec du sable qu’on fait du béton..
Il ne sert sans doute à rien de se croire capable ou incapable d’obéir à Dieu. Ce qui compte, c’est notre désir d’écouter sa Parole et d’en vivre. Tenir nos engagements, c’est important, mais y parvenons -nous ? Il y a quelque chose de plus fort encore, c’est le fait de tenir à nos engagements. Quelle différence, me direz-vous ? Juste une minuscule préposition, mais qui fait ..toute la différence.
« Tenir à » nos engagements, cela signifie que nous y tenons, que nous les aimons, que nous leur accordons du prix, de la valeur.. Alors, l‘attachement que nous portons aux engagements qui nous font vivre, c‘est peut-être cela le roc, le rocher de notre vie.
Amen
Titia Es-Sbanti – Prédication du 19/09/20, paroisse du Mas des abeilles.
Lecture biblique : Matthieu 7, 24-27
Tout homme qui écoute ce que je vous dis là et le met en pratique est comparable à un homme avisé qui a bâti sa maison sur le roc.La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, la tempête a soufflé et s’est abattue sur cette maison ; la maison ne s’est pas écroulée, car elle était fondée sur le roc.Et tout homme qui écoute ce que je vous dis là sans le mettre en pratique est comparable à un homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable.La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, la tempête a soufflé, elle a secoué cette maison ; la maison s’est écroulée, et son écroulement a été complet.»